L’intérêt de la Chine pour les pesticides
Les gazettes ont évoqué les achats répétés de terres agricoles – en Asie, en Afrique mais aussi en France – par des sociétés chinoises. Depuis des années, les gouvernements de ce pays se sont préoccupés de l’alimentation humaine et des questions agricoles en général. Ils en ont fait un enjeu stratégique. Rappelons qu’il s’agit de nourrir la plus importante population mondiale dont les goûts ont évolué : aujourd’hui la Chine est le plus gros importateur de produits agricoles. Ce qui explique que les Chinois aient montré une grande attirance pour la chimie agricole : en 2006-2007, le groupe chinois ChemChina acquiert Adisseo (nutrition animale) et Rhodia Silicones. En 2011, la filiale agricole de ChemChina fusionne avec la société israélienne Makhteshim Agan (industries phytosanitaires). En 2013, l’entreprise de viande de porc, WH Group a acheté son concurrent américain Smithfield Group pour 4,7 milliards de dollars. Cofco, très gros conglomérat public, qui a pris 49 % du capital de la filière agricole de Noble Group (de Hong Kong), puis un Néerlandais, serait en mesure de concurrencer des négociants mondiaux tels Cargill ou ADM. En 2015, ChemChina met la main sur l’Italien Pirelli. En 2016, toujours le même groupe d’investissement d’État prend des parts dans Krauss-Maffei (mécanique). En février dernier, le groupe chinois propose 43 milliards de dollars et achète le suisse Syngenta, le « géant helvétique des pesticides et des semences » longtemps guigné par Monsanto.
La force des Chinois tient dans la variété de leurs tactiques : ils jouent des règles capitalistes, tout en conservant des groupes d’État et en opposant un protectionnisme farouche contre les approches occidentales de pénétrer leur marché. Vilmorin, quatrième semencier mondial s’en est rendu compte. Il a été contraint, en 2009, de céder sa participation dans le numéro un chinois du riz hybride LongPing. Selon Laurence Girard, avec Syngenta, ChemChina « deviendra un des plus puissants fournisseurs de pesticides, d’engrais et de semences du monde » (Le Monde, 04/02/2016). Ce qui pourrait ouvrir le marché chinois aux OGM. Sur ce dernier sujet aussi, la position chinoise est fort biaisée : la Chine interdit à son armée de manger du riz OGM, mais ce riz est vendu en Occident ! En faisant ses achats boulimiques (pesticides, semences…), la Chine tient à suivre de près les évolutions des techniques et des productions. L’écologie, c’est bon pour les Occidentaux naïfs.