La Bundesbank (la Banque centrale allemande) annonçait récemment une provision de 22 milliards d’euros, en indiquant que ces pertes étaient liées aux obligations détenues dans son portefeuille en raison de la politique économique néfaste menée par la BCE. Obligations que la Bundesbank a été obligée d’acheter à la BCE, mais qui sont des obligations d’État. La Banque de France elle vient de racheter pour 313 milliards de dette souveraine française ! Nous assistons devant nos yeux au rachat des dettes des obligations des États de la zone Euro par les banques centrales de ces mêmes États. Ne pouvons-nous pas trouver quelque chose de louche là-dessous ? En réalité, nous venons de constater ici la mort de la BCE, puisque la dette de la France est devenue propriété de la Banque de France. La BCE n’est plus propriétaire que d’une coquille vide, l’euro ; le poussin en est sorti pour retourner dans le « pré carré ». Voyons ici de nouvelles raison de supprimer cette monnaie, qui n’en est pas une.
Lu pour vous dans la revue Royaliste
Pour ces experts, la sortie de l’euro n’entrainerait pas automatiquement une amélioration de la balance courante. Certains secteurs seraient avantagés comme le tourisme, d’autres non comme l’agriculture. Mais l’étude reconnait qu’il est impossible de mesurer l’effet total d’une richesse sur les ménages ou encore les variations de change. En somme, tout départ de la zone euro serait un suicide économique et politique. Et si ce n’est pas le cas, les gains à espérer d’un départ sont modestes ou dérisoires.
Les citoyens que nous sommes sont alors placés dans une situation déroutante : il n’y aurait pas de salut hors de la zone euro, mais rien ne nous est dit des raisons positives d’y demeurer ! En effet, nous sommes au royaume de la démonstration par la négative. Aucun bilan sérieux des avantages de l’euro ne nous est offert. Si l’on prend le Livre Blanc consacré à l’avenir de l’Europe diffusé le ler mars, une seule occurrence positive de l’euro est énoncée : l’euro facilite les échanges. Une affirmation dénuée de preuves.
Il faudrait donc attendre des améliorations institutionnelles, un hypothétique fédéralisme, un aménagement du rôle de la BCE, des mesures dites sociales pour enfin voir l’euro donner tout son potentiel… Face à cet état de fait, le peuple est jugé impatient et bien évidemment gangréné par les populismes. Plus d’un quart de siècle après Maastricht, notre patience est encore sollicitée pour des lendemains qui déchantent ! L’aveuglement dogmatique l’a emporté une fois pour toutes et nous devons retenir que l’euro est une bonne monnaie et qu’il faut le défendre. L’euro vaut pour lui-même. Mais qu’on prenne le temps, une fois au moins, de faire le bilan de ce fétiche. Ce travail a la beauté des choses inutiles car aussi précis soit-il, il ne pourra convaincre les membres de l’Église européiste. Au moment de nous livrer à cet exercice, nous devons tous garder en mémoire la mésaventure instructive de Yanis Varoufakis dans l’Eurogroupe. En bon universitaire, il a cru qu’il réussirait à démontrer que l’austérité tue la Grèce mais « il y avait un refus total d’entrer dans une discussion économique ». Mais ne désespérons pas de la raison, et livrons-nous à l’exercice.
Pour y parvenir, il convient de revenir aux espérances initiales de l’euro. Six arguments économiques ont été avancés dans le rapport Emerson de 1990 pour promouvoir la monnaie unique : la fin des incertitudes liées aux fluctuations des taux de change, la disparition des coûts de transaction et le développement des échanges intracommunautaires, la transparence en termes de prix et de coût, les rendements d’échelle en favorisant la taille des marchés, l’augmentation de la liquidité et de la largeur des marchés financiers européens, la capacité de la monnaie unique à devenir une monnaie internationale.
L’espace de cet article ne me permet pas de reprendre chacun des points mais prenons la question des échanges et du niveau de vie après plus de quinze ans de monnaie unique. L’économiste américain Andrew Rose, en 2000, estimait que la création d’une union monétaire entrainerait un triplement des échanges, d’autres études évoquaient un doublement des échanges. Or Antoine Berthou et Lionel Fontagné ont constaté en 2012 une hausse de 5% des exportations françaises.
Pire : une étude de Leigh Drake et Terence Mills de 2010 suggère que l’adoption de l’euro a réduit le taux de croissance tendanciel, aussi bien dans la phase préparatoire de l’euro que dans celle qui a suivi son adoption.
Pire : dans une étude publiée en 2015, Perea et Fernandez se demandent, à partir d’un modèle économique, quelle aurait été la croissance du PIB par tête de la zone euro, si chacun de ses membres n’avait pas adopté l’euro. Ils observent qu’il n’y a pas eu d’accélération de la croissance comme l’espéraient ses promoteurs. Et ils notent dans leurs conclusions que, pour le Portugal ou l’Italie, la croissance aurait été plus forte loin de l’euro. Le cas italien est d’autant plus probant que l’Italie n’a pas connu une année de croissance depuis son entrée dans l’euro. Il faut ajouter que l’euro a revêtu un caractère procyclique. Lors de ses dix premières années d’existence, l’euro s’appréciait dans la phase de croissance faible et se dépréciait en croissance forte. Le surplus de croissance insufflé par la zone, euro a été insuffisant pour que les États membres renouent avec la croissance annuelle moyenne d’avant 1992. Les grands pays comme la France, l’Italie ou l’Allemagne ont moins profité de l’euro, il a été profitable surtout avant la crise aux pays de taille moyenne comme l’Espagne ou de petite taille comme la Grèce, la Finlande et l’Irlande. Mais nous savons sur quelles bases fragiles et artificielles reposait la croissance de l’Irlande et la Grèce… En somme, avant la crise de 2008-2009, la zone euro allait mieux que dans les années 1990, mais n’allait pas bien. L’euro a fait diverger les économies, les a laissées vulnérables à la spéculation. Il n’était qu’un bouclier de verre ; il a offert une croissance atone et une politique économique inadaptée.
Mais tous ces arguments ont peu de poids puisqu’il a été décrété par nos faiseurs d’opinions et nos gouvernants que l’Union c’est la paix et que la monnaie, on s’y soumet ou on se démet. Peut-être est-il temps de reprendre notre destin en main et renoncer à cette monnaie inique plus qu’unique.
César MONDOVI
Royaliste N°1119, Bimensuel de la Nouvelle Action Royaliste