Quelques éléments de réflexion au sujet de la question russe

Quelques éléments de réflexion au sujet de la question russe

Nous nous permettrons de signaler que cette question a souvent été abordée sous divers aspects par des auteurs qualifiés bien avant que ne surviennent les tragiques événements récents en Ukraine. Événements qui d’ailleurs ont fini par être relayés au second plan, puisque c’est le conflit israélo-palestinien qui excite les passions partisanes et mobilise les peuples une fois de plus manipulés, et ce dans le but de semer la haine et la division à l’échelle mondiale. Ainsi les crises s’enchaînent à un rythme infernal sans que personne ne semble y comprendre quoique ce soit.

Un des auteurs, et non des moindres, à avoir abordé le sujet russe avec beaucoup de clairvoyance fut l’ancien membre du contre-espionnage français Pierre de Villemarest par le biais duquel nous commencerons notre exposé. En effet celui-ci n’avait pas attendu le déclenchement du conflit russo-ukrainien pour se livrer à cette importante analyse sur les liens unissant Vladimir Poutine à la puissante secte des Juifs loubavitchs de Russie :

« À cette époque (l’auteur parle des années 90 : NDLR), l’attention de Vladimir Poutine fut attirée par la secte des Loubavitchs, laquelle végétait en Russie depuis 1990 autour d’un étrange jeune rabbin : Berel Lazar, né à Milan, et qui avait suivi aux États-Unis les séminaires réservés aux futurs rabbins. Lazar avait séjourné en 1990 en Russie ; muni d’un visa valable un an, mais finalement il avait choisi de s’y ancrer (…) En 2000, nous avions noté un geste étrange de Poutine : il avait ouvert les portes et les salles du Kremlin à la fête annuelle des Loubavitchs. Cela ne s’était jamais vu, ni du temps des tsars, ni sous Staline, encore moins du temps de Khrouchtchev ou de Brejnev ! (…) En septembre suivant, selon nos sources à Moscou, Poutine accorda dix millions de dollars de subventions à la Fédération animée par Lazar, sous prétexte d’aider à la création d’un centre de formation loubavitch. Ce geste amorça les dons de plusieurs richissimes juifs, dont celui du plus fortuné des oligarques : Roman Abramovitch (…) C’est un fidèle de Vladimir Poutine, de même que l’oligarque Georges Rohr, un des plus importants investisseurs en Russie, qui s’active depuis sa résidence américaine. »

L’auteur continue :

« Ici l’observateur doit s’interroger. La fédération présidée par Berel Lazar compte à ce jour 4000 prosélytes, dont 150 seulement animent le secteur russe, mais 3850 sont répartis dans 73 communautés d’autant de pays étrangers. Un vrai succès en moins de dix ans de l’activisme loubavitch, dont les missionnaires s’appellent eux-mêmes des « chabadniks », terme formé des initiales, de l’acronyme des mots hébreux : « Sagesse, savoir et compétence (…) De tout temps, les services russes ont préconisé la supériorité de l’espionnage « humain » sur l’espionnage par des moyens technologiques, souvent privilégiés par la CIA ou d’autres services secrets. Importance donc pour eux de l’emploi, sinon d’espions proprement dits, du moins d’agents d’influence dans les milieux politiques, commerciaux et religieux. C’est un aspect à ne pas négliger, en observant les communautés implantées dans nos pays et en particulier en France. Les Européens inconditionnels de Vladimir Poutine devraient réfléchir lorsqu’ils se félicitent que leur « héros » ait su écarter des allées du pouvoir les oligarques d’origine juive. Or, sept sur dix sont issus de cette communauté. »

Pierre de Villemarest, cité par Jacques Delacroix dans Donald Trump, Cabbale et illuminisme (Éditions Delacroix, 2017), p. 65-68.

Rappelons également que cet auteur très bien informé dont on louera la lucidité avait mis en garde le camp nationaliste contre l’influence délétère d’un Alexandre Douguine il y a déjà plus de vingt ans (lire à ce sujet Le Mondialisme contre nos Libertés, Éditions L’Icône de Marie, 2021).

Citons maintenant un écrivain guénonien, promoteur exalté de l’Eurasisme, dont nous avions recensé dans notre no 797 le passionnant mais difficile ouvrage :

« Vladimir Poutine, c’est avant tout et très essentiellement l’émanation directe des conseils secrets révolutionnaires permanents des Forces Armées de l’Union Soviétique, qui se cherchaient, et qui guettaient l’occasion de faire surface, de franchir la ligne du passage à l’histoire visible, active, depuis déjà les années 1948-1952, quand il y avait eu les premières manifestations de taille de leur action, de leur présence combattante, de leur volonté d’affirmation politique propre, non pas contre l’État Soviétique, mais confidentiellement au sein même des structures de pouvoir de celui-ci. C’est depuis lors que l’on a pu parler d’une doctrine national-révolutionnaire immanente des Forces Armées de l’Union Soviétique, doctrine qui est allée en se précisant d’une manière de plus en plus décisive à partir des années soixante, et dont les thèses géopolitiques de base se sont trouvées confidentiellement soutenues par L.I. Brejnev et, par la suite, ouvertement ou presque par Y.V. Andropov. »

Jean Parvulesco, Vladimir Poutine et l’Eurasie (Éd. Omnia Veritas, 2017), p. 272.

Un excellent connaisseur du système communiste, et fin analyste de la société libérale occidentale, le dissident Alexandre Zinoviev préfigura d’une certaine façon l’arrivée de Vladimir Poutine dans ce passage tiré de l’un de ses romans réalistes publié en 1982 et intitulé La Maison jaune. Gageons que Zinoviev savait très bien de quoi il parlait en écrivant ces lignes prophétiques :

« Par sa nature sociale, l’idéologie est appelée à tromper, à duper, à guider les gens dans la direction désirée. Et pour bien tromper, il faut que le dupeur connaisse la vérité. Un bon trompeur n’invente pas, il dit la vérité, mais en respectant les règles de la duperie. L’idéologie professionnelle possède, elle aussi, ses lois que Staline en son temps connaissait parfaitement et qu’on a ensuite oubliées. Il est temps de se les remettre en mémoire. J’en appelle aujourd’hui à la construction positive d’une nouvelle idéologie qui serait adéquate à la société établie et servirait peut-être au Staline à venir. Car je ne doute pas qu’il vienne. J’entends déjà son pas assuré et sa puissante voix. »

Cité par Jean Thiriart dans L’Empire euro-soviétique de Vladivostock à Dublin (Éditions de la Plus Grande Europe, 2018), p. 261.

On notera donc que la « rupture » entre la Russie soviétique et la Grande Russie orthodoxe de Vladimir Poutine n’est en fin de compte qu’un écran de fumée plus ou moins convaincant qui ne dupera que les plus naïfs…

Concernant le peuple russe et ses singularités, nous nous fierons pour commencer aux remarques d’Henri Massis tirées de sa très importante Défense de l’Occident parue en 1927 et dont nous recommandons vivement la lecture :

« Qui veut comprendre l’étrange destinée du peuple russe doit interroger son histoire religieuse, car, jusqu’au siècle dernier, la religion fut la seule langue dans laquelle il put s’exprimer. Et à ceux qui prétendent que la Russie ne saurait se soustraire à l’influence de la culture européenne, on ne manque jamais de répondre, comme faisait Dostoïevski : “Il y a une culture que nous n’avons pas besoin de puiser à la source occidentale, parce qu’elle est de source russe…Je certifie que notre peuple est cultivé depuis longtemps, depuis qu’il s’est assimilé l’essence de la doctrine chrétienne.” Et Dostoïevski ajoutait : On m’objectera : le peuple russe ne connait pas la doctrine chrétienne, et il n’entend aucun prêche. Mais c’est une objection vide de sens : il sait tout, tout ce qu’il faut savoir, bien qu’il puisse échouer à un examen de catéchisme. Il s’est instruit dans les églises où, durant des siècles, il a entendu les prières, les hymnes qui valent mieux que les sermons. ” »

Henri Massis, Défense de l’Occident (Éd. L’Aencre, 2021), p. 97-98. (LIRE LA SUITE DANS NOTRE NUMÉRO)

I. C.

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