L’Opep est une oligopole, c’est-à-dire que le marché qu’elle exploite connaît une demande permanente et vitale, et il y a peu de concurrence. C’est donc un monopole, aussi. Dans cette organisation, les Émirats Arabes unis sont majoritaires, et contrôlent la production de pétrole depuis la fin de la dernière guerre. L’Opep peut tomber, mais les Émirats, eux, soutenus par une politique protectionniste américaine (malgré les Twin Towers et autres « incidents »…) totalement dépendante des exploitations arabes, n’auront qu’à proposer au plus offrant. Gageons que la Russie, « nouvelle économie montante » de l’Est, saura trouver un accord. Il faudra alors certainement accepter la politique du « fifty-fifty » que les Émirats négocièrent parfaitement avec les apatrides américains : 50% du chiffre devra être reversé… aux Émirats. Si l’Europe parvient à banaliser rapidement les véhicules à énergie parallèles, peut-être alors assisterons-nous à un ersatz d’indépendance politique, face à un moyen-orient pour le moment déterminant, dans l’histoire de l’Ouest européen.
Lu dans Présent :
Mort… ou résurrection de l’Opep ?
Le 16 août à Moscou, le ministre russe de l’Énergie, Alexandre Novak, a annoncé pour octobre une réunion avec l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). Lors d’un récent entretien publié par le journal saoudien Asharq Al-Awsat, il a assuré que son pays était prêt à collaborer avec l’Arabie saoudite afin de parvenir à une stabilisation du marché.
De son côté, le président de l’Opep, le Qatari Mohammed Bin Saleh Al-Sada, avait annoncé la semaine précédente une réunion informelle des pays membres de l’Opep en marge du 15e Forum international de l’énergie organisé du 26 au 28 septembre à Alger. Fin avril, une première réunion à Doha avait réuni la Russie et les membres de l’Opep, menés par l’Arabie saoudite. Elle s’était achevée sur un échec, prévisible en fait et qui n’a surpris que ceux qui ignorent la politique des Saoudiens.
Depuis la baisse des cours du pétrole mi-2014, en effet, avec les tensions budgétaires que connaissent la majorité des pays Opep (33 millions de barils/jour en juillet 2016) et la Russie avec un record de production en juin et juillet 2016, dans la pratique des affaires, ces pays ont accru la quantité pour suppléer à la baisse des prix. Il est vrai que le ministre du Pétrole saoudien, Ali El Naimi, sera, une fois de plus, un interlocuteur difficile. Dans une interview accordée à la chaîne de télévision américaine CNBC, il s’est autorisé à déclarer que « personne ne peut fixer les prix du pétrole, tout dépend d’Allah ».
Dans le contexte actuel, les prix du pétrole sont en chute libre, le prix du baril est passé de 114 dollars pour ne remonter qu’à 67 dollars. Premier producteur de pétrole au monde, l’Arabie saoudite domine au sein de l’Opep depuis des décennies. Il ne s’oppose pas seulement aux pays qui, comme l’Iran ou le Nigeria, ont des coûts de production élevés et préféreraient baisser la production afin que les prix augmentent. L’Arabie saoudite s’oppose à des pays comme le Venezuela, l’Algérie et la Russie, qui misent sur des prix élevés pour soutenir leur économie et leurs finances publiques. Cette contradiction est considérée depuis longtemps comme équivalant à la mort de l’Opep.
Un éventuel accord russo-saoudien ne relancerait pas seulement l’Opep, il changerait complètement la donne. Lorsque cette organisation fut créée en 1960, elle se donnait pour objectif de faire contrepoids à la toute-puissance des compagnies multinationales. Compte tenu du poids des Saoudiens, elle était devenue progressivement un partenaire très utile de la politique américaine, tout en écartant jusqu’ici la Russie.
Présent, mardi 23 août 2016, n°8676, p. 3