Lu dans Présent du 19 juillet 2018. Propos recueillis par François Franc. Francis Bergeron, depuis quatre ans, le quotidien Présent publie donc épisodiquement des « hors-série ». Notre quotidien ne s’écarte-t-il pas de son rôle ? Et ne fait-il pas concurrence à certains de vos confrères ?
Il est vrai qu’un quotidien n’a pas besoin de « hors-série ». Je dirais même que l’immédiateté de l’information apportée par un quotidien et le nécessaire recul sur l’actualité que présente un dossier « hors-série » sont des approches à l’opposé l’une de l’autre.
Mais vous remarquerez pourtant que la plupart des quotidiens produit des « hors-série », voire des magazines de fin de semaine.
Il y a une double explication à ce phénomène.
D’abord un quotidien nécessite la mobilisation d’importants moyens, notamment logistiques, rédactionnels et de mise en page. Mais en phase de routine, ces moyens sont loin d’être exploités à 100%. Le « hors-série » optimise les moyens. Ensuite le modèle économique des « hors-série », pour peu que le sujet soit bien choisi, est un système rentable par essence. Et en tout état de cause, les risques financiers sont très faibles, pour le coup.
N’allez-vous pas avoir la tentation de lancer aussi un hebdomadaire, pour les mêmes raisons ? De ce fait, vous rentreriez en concurrence frontale avec plusieurs titres plus ou moins proches…
Faire un hebdomadaire en plus du quotidien, et « en temps masqué » constituerait une charge de travail autrement plus volumineuse que ces « hors-série », ce qui dépasserait nos moyens. Nous produisons déjà un supplément littéraire hebdomadaire, intégré dans le quotidien. Il comporte quatre pages en été, et huit pages le reste de l’année. Il fait donc un peu office d’hebdomadaire. D’ailleurs nous constatons que nos ventes en kiosque sont bien plus importantes le week-end, alors que ce numéro de fin de semaine du quotidien est plus cher (3 euros au lieu d’1.80 euro). Ceci prouve qu’il y a la demande. La formule idéale serait de trouver une forme de partenariat avec l’équipe d’un hebdomadaire partageant l’intégralité de nos valeurs et aussi notre style de fonctionnement et d’expression. Ce n’est pas un exercice évident. Les hommes d’entreprises savent que les rapprochements, les fusions, échouent bien souvent pour des raisons de cultures d’entreprises incompatibles. Quand on parle en outre d’entreprises où les préoccupations politiques, spirituelles et culturelles sont fortes, on imagine bien tous les obstacles qu’il faudrait parvenir à franchir. Mais pourquoi pas ? L’équipe de Présent sera toujours ouverte à toute collaboration, sous quelque forme que ce soit, avec des médias proches.
Enfin les « hors-série » ne font concurrence à personne, car il n’existe pas, actuellement, à notre connaissance, de revues à thème, dans notre famille d’idées, qui soient présentes en kiosques. Le Crapouillot avait tenté de renaître de ses cendres, il y a quelques années mais le projet a échoué, semble-t-il. Peut-être était-il trop ambitieux au niveau de la qualité du papier. du nombre de pages. Nos « hors-série » à nous sont de volume et de prix plus modestes. Ils semblent bien avoir rencontré leur public.
En juin, vous avez alerté les lecteurs sur vos difficultés financières. Les « hors-série » ne créent-ils pas une source potentielle de difficultés financières supplémentaires ?
C’est une question que nous posent en effet certains lecteurs, mais jusqu’à présent nous avons au contraire toujours gagné de l’argent sur les ventes des « hors-série », qu’il s’agisse de ceux de la période 2014-2017, ou de ceux de la nouvelle série, édités cette année.
Non seulement ils ne perdent pas d’argent, mais ils en gagnent (un peu), et c’est Présent quotidien qui bénéficie de ces recettes supplémentaires. Mais le vrai profit apporté par les « hors-série » n’est pas là. Il est dans les campagnes d’affichage qui accompagnent leur mise en kiosque, et qui, du même coup, font de la publicité pour le quotidien : des affiches sont apposées dans 650 kiosques, et favorisent la vente du quotidien, en parallèle à la vente du « hors-série ».
Enfin je précise que les articles publiés dans les « hors-série » ne sont pas rémunérés. De ce fait, les coûts sont limités à la fabrication et à la distribution du journal, ainsi qu’à l’affichage en kiosques.
La diffusion est encore modeste (moins de 10 000 exemplaires), mais suffisante pour générer un bénéfice, qui est en outre amélioré par des encarts publicitaires payants.
Y a-t-il un programme éditorial des « hors-série », une prévision de thèmes qui seront prochainement abordés ?
Oui, bien entendu. En septembre, nous prévoyons de publier un numéro sur la rentrée théâtrale. Il y a de bonnes pièces à aller voir. Il y a aussi de bons acteurs, de bonnes troupes, et même des auteurs, encore peu connus, qui mériteraient d’être découverts. Beaucoup de troupes d’amateurs ou de semi-professionnels jouent dans des pièces, et ils aimeraient avoir davantage d’occasions de se produire, de montrer ce qu’ils savent faire. Savez-vous par exemple qu’il est possible de voir jouée la pièce de Robert Brasillach, La Reine de Césarée ? Nous allons raconter ce bouillonnement artistique.
D’autres numéros sont envisagés, par exemple sur le roman policier, sur les résistances à l’islamisme, sur les différentes formes d’expression musicale politiquement incorrectes, sur la brocante et la Chine, sur l’œuvre de François Brigneau et de Jean Madiran, sur le livre pour enfants etc. Et compte tenu du succès rencontré par le « hors-série » sur la bande dessinée, il est tout-à-fait envisageable d’y revenir, plusieurs étés. C’est un très bon thème : voyez la couverture du dernier Figaro Magazine. Voyez toutes ces revues à gros tirages qui consacrent leur numéro d’été à Astérix, Blueberry ou Tintin.
Nous voudrions enfin permettre à des jeunes talents, des journalistes débutants, de faire leurs premières armes dans ces « hors-série », sous la houlette de journalistes chevronnés de l’équipe de Présent. Avis aux amateurs !
Les « hors-série » Histoire-Actu du présent ont donc de belles perspectives d’avenir. Vous allez encore en entendre parler !