Lu dans Faits & Documents n°451 de mai 2018. Visant à démontrer les progrès réalisés par la Deutsche Bank, son rapport annuel publié en mars dernier affiche un passage de son leverage (multiple d’endettement réel) sous la barre de 30 (Lehman Brothers avait fait faillite avec un leverage de 32) ainsi qu’une augmentation de capital de 8 milliards d’euros en avril 2017. L’économiste Jean-Pierre Chevallier, qui a attentivement décortiqué ce rapport sur son passionnant blog (chevallier.biz), remarque que sur les prêts (loans) qui se montent à 405,621 milliards d’euros, les pertes (allowance for loan losses) ne sont « que » de 3,921 milliards d’euros, ce qui correspond à un ratio de créances douteuses (NPL) de 0,97%, un chiffre extrêmement bas traduisant soit une véritable prouesse de la Deutsche Bank (selon la BCE, ce ratio est de 6,2% en moyenne dans les grandes banques de la zone euro), soit un maquillage massif de ses comptes. Si un tel exploit avait été réalisé, pourquoi Kim Hammond, directrice des opérations de la Deutsche Bank, l’a-t-elle décrite comme l’ « entreprise la plus dysfonctionnelle où j’ai travaillé » (elle est depuis donnée partante) et pourquoi son directeur général John Cryan a-t-il été évincé mi-avril ? Autant d’éléments laissant entrevoir une véritable vendetta en interne, d’autant que parmi les actionnaires de la Deutsche Bank (où l’on retrouve BlackRock, la famille royale du Qatar, le milliardaire américain Stephen Feinberg, Morgan Stanley, etc.), UBS contrôle 14% des droits de vote auxquels s’ajoute la représentation du groupe chinois HNA (9% des droits de vote), soit un total de 23%. Or, celui qui apparaît comme le véritable tireur de ficelles, Axel Weber, en tant que président du conseil de surveillance d’UBS, est animé par une rancœur tenace vis-à-vis de la BCE. Après s’être opposé vivement au président de la BCE Jean-Claude Trichet lorsqu’il dirigeait la Bundesbank, la banque fédérale d’Allemagne, Axel Weber avait préféré renoncer à lui succéder pour prendre la tête d’UBS en mai 2012.