Alep : ce qu’on ne dit pas…

Alep : petit rectificatif en faveur du réel…

Lu dans Présent :

Désinformation sur Alep

Il pourrait être amusant, si ce n’était drama­tique, de constater que seuls les journalistes qui ont eu le courage d’aller jusqu’à Alep pen­dant cette guerre livrent aujourd’hui un mes­sage sensiblement différent sur l’actualité de cette ville martyre.

a-damaged-tank-is-pictured-amid-the-damage-near-umayyad-mosque-in-the-government-controlled-area-of-aleppo_5763943Depuis plusieurs semaines, les têtes d’af­fiches médiatiques et politiques martèlent le même discours : les quartiers est de la ville d’Alep sont bombardés par les armées russe et syrienne et personne ne peut rester indifférent devant la mort de tant de civils. Personne ne pourrait en conscience contes­ter la seconde partie de la phrase : ce quotidien de deuil est injuste pour toutes les familles in­nocentes du pays.

Sauf qu’une question vient immédiatement à l’esprit de quiconque a visité les quartiers ouest de la ville depuis cinq ans : où étaient ces bonnes âmes lorsque les civils étaient privés d’eau et d’électricité, et bombardés jour et nuit par ces « rebelles » que trop d’Occidentaux ont continué à croire « modérés ». Le correspondant du journal`qatarien Qads al-Arabi, à Alep, écrivait ces jours-ci : « Les groupes (rebelles) ont oublié l’obligation religieuse de s’unir entre eux ». Qui peut en­core croire, alors que toutes les factions re­belles déplorent aujourd’hui leur désunion, que les différences entre ces groupes aient été essentielles ?

L’armée syrienne a en effet forcé, ces der­niers jours, les rebelles — qui sont objective­ment des terroristes et rien de moins — à quit­ter leur bastion de la vieille ville. Ils se regrou­pent désormais dans trois quartiers du sud de la ville que le gouvernement syrien devrait réussir à évacuer rapidement.

1027289143Des civils meurent dans ces combats, bien sûr. Mais des deux côtés ! Pourquoi manipuler l’opinion occidentale au point de lui faire croire que l’on meure d’un seul côté de la bar­ricade… ? Bachar el-Assad a refusé tout cessez-le-feu, c’est vrai aussi. Mais pourquoi ne pas préciser que ce sont ces terroristes qui ont systémati­quement rompu, sans prévenir, les trêves im­posées par les Russes et précédemment accep­tées par le gouvernement syrien ?

Des civils sont bloqués dans les quartiers est d’Alep, c’est encore une fois exact. Mais pour­ quoi ne pas décrire honnêtement la situation ? Des couloirs humanitaires ont été régulière­ment ouverts pour ces civils des quartiers est, des snipers les ont visés depuis les quartiers re­belles alors qu’ils tentaient de fuir. D’autres soutiennent idéologiquement les rebelles et re­fusent de quitter ces quartiers : ils choisissent un camp et la guerre se poursuit. L’atrocité est celle de la guerre, et non celle d’un gouverne­ment qui se défend, le constat n’enlève rien aux critiques politiques légitimes par ailleurs, contre des rebelles unis par l’islamisme.

1027047527Pourquoi ne montrer que des civils des quartiers est terrorisés par le gouvernement sy­rien alors que circulent également de nom­breuses vidéos montrant des familles entières passer à l’ouest avec des cris de joie… ? Ces questions sont évidemment rhétoriques et la réponse est politique : la diplomatie fran­çaise a décidé de défendre envers et contre tout un plan d’action qui a pourtant échoué dans le pays. Les médias abondent docilement dans le même sens. Sauf pour ceux qui ont eu l’hon­nêteté de faire leur métier malgré tout, en en­voyant quelqu’un sur place.

MARIE POMMERET

marie-pommereepresent.fr

Présent, n° 8752, 9 décembre 2016

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