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Yvan Blot : « Plus il y aura de diversité, moins il y aura de fraternité »

ByLectures Francaises

Avr 27, 2017

Un entretien avec Yvan Blot qui donne son point de vue sur les énarques, sur l’élection présidentielle et les problèmes soulevés par l’invasion migratoire.

Lu pour vous dans Monde et Vie

Yvan Blot est aujourd’hui très engagé auprès du président Poutine et il connaît bien la Russie, où il va fréquemment donner des cours. Il poursuit une réflexion fondamentale sur l’homme et sur les conditions de l’excellence humaine.

Yvan Blot, vous êtes vous-même énarque. Que pensez-vous de ceux qui s’en prennent à l’énarchie française ? Les énarques ne sont-ils pas les conseillers dont tout Prince a besoin, même le prince républicain ?

Je suis énarque et personne n’est parfait. Mais je me définis comme un énarque défroqué. Qu’est-ce à dire ? L’ENA m’a appris beaucoup de choses en matière d’administration mais pas en matière politique. Les énarques qui sont formés pour être fonctionnaires et non politiciens ou hommes d’Etat ont des connaissances de droit public de bon niveau et savent un peu d’économie (ils ignorent l’économie au niveau de l’entreprise). Mais surtout, leurs connaissances en matière d’histoire, de philosophie et même de culture générale présentent des lacunes très graves, dirimantes pour des hommes d’État. Enfin, et surtout, l’éthique qui règne à l’ENA n’est pas celle de l’intérêt général ni même celle du patriotisme mais celle de la pure carrière personnelle. Voyez Macron ! Après la Deuxième Guerre mondiale, quand l’ENA fut créée, ce fut dans l’esprit du patriotisme et de la résistance. La première promotion porta le beau nom de « France combattante ». Aujourd’hui, il faudrait remplacer ce nom par «carrière méritante» ! Je ne méprise pas les gens qui ont des soucis de carrière, mais si ces soucis l’emportent sur le patriotisme et le service d’autrui, je trouve cela éminemment critiquable ! C’est le cas aujourd’hui. Il est déplorable, de plus, que les énarques monopolisent le conseil du Prince : il faut des gens variés, ce n’est pas le cas aujourd’hui où tous les conseillers sont issus d’une même classe dirigeante cosmopolite. J’espère ne pas être qu’un énarque au sens moderne et dégénéré du terme.

Quels conseils auriez-vous donné à votre candidat à l’élection présidentielle, pour qu’il ou elle ait pu traverser le « mur du çon » (comme dirait le Canard) de la plus folle des campagnes présidentielles ?

C’est une question difficile. Mais je pense qu’il aurait fallu lui conseiller de contester les questions posées par les journalistes. Ils sélectionnent les sujets qui leur conviennent sans réfléchir pour savoir si ce sont les sujets qui intéressent l’électorat. Par exemple, ils auront tendance à occulter les sujets qui ne leur conviennent pas comme l’immigration. Les débats prennent alors une tournure qui n’a rien à voir avec l’intérêt réel des citoyens, notamment de savoir si tel député a bien utilisé tel assistant parlementaire ou si tel autre paye ses propres costumes ou non. Les sujets importants sont alors marginalisés notamment tous ceux de politique étrangère : que pensez-vous de la domination américaine sur l’Europe ? Faut-il se réconcilier avec la Russie ? Comment faire cesser la guerre en Ukraine ? À quoi sert l’OTAN ? C’est tout de même plus important que de savoir comment tel candidat salarie ou non ses enfants. Les journalistes n’ont pas la culture voulue pour poser ces questions importantes et ils se réfugient dans les affaires de chiens écrasés. Or, les hommes politiques se laissent ballotter au gré des caprices des journalistes. Ce retournement des rôles et du rapport de forces souhaitable abaisse le niveau du débat politique de façon indigne. Il parait que les Français sont déçus par la campagne présidentielle de 2017 : les responsables sont les journalistes qui rabaissent le niveau des questions à traiter et les politiques complices qui se soumettent de façon indigne.

Faites-vous partie de ceux qui se sentent à l’étroit dans les institutions que nous a léguées le général De Gaulle ?

Le général De Gaulle a eu le mérite de nous sortir des institutions grotesques de la IVe République issues du tripartisme : MRP, socialistes et communisme. Il a réhabilité le référendum détesté des parlementaires. Il a donné le droit de vote aux femmes, rejeté pendant des années sous l’influence des francs-maçons qui soupçonnaient les femmes d’être influencées par les curés et d’être de droite par manque de culture.
Mais il n’est pas allé assez loin, et c’est pourquoi les moeurs détestables de la IVe République reviennent aujourd’hui. De Gaulle avait vu le vice du régime républicain de l’époque : c’était une oligarchie et non une démocratie. Il pensait que le référendum permettrait de court-circuiter les groupes de pression et les partis politiques afin que le peuple puisse s’exprimer dans son authenticité. Je suis d’accord avec cette idée mais pour qu’elle soit appliquée, il faut introduire dans nos institutions le référendum d’initiative populaire. En France, les référendums qui ont eu lieu étaient d’initiative présidentielle. On en perd le sens de ce genre de scrutin : certes le peuple répond à la question posée, mais c’est toujours soit pour défendre soit pour condamner le président de la République. Avec l’initiative populaire (une pétition de citoyens demandant un référendum sur un sujet précis), cette ambiguïté disparait. La Suisse pratique ce régime et c’est pourquoi les impôts sont plus faibles chez elle, l’immigration mieux contrôlée ou la souveraineté maintenue (le peuple suisse ne veut pas adhérer à l’UE, contrairement à ce que veulent ses élites).

Êtes-vous dans la perspective « économique d’abord » qui semble être souvent celle de François Fillon ?

Il y a des sujets plus importants que l’économie comme la démographie : la France ne survivra que si la natalité française remonte et que l’on arrête l’invasion migratoire. Un autre sujet est plus important que l’économie : la santé spirituelle et culturelle de la nation. Là, le modèle serait plutôt la Russie.
L’économie est importante mais elle est soumise à des nécessités supérieures. Une société qui a dévalorisé l’armée a beau être riche, cela ne lui sera pas utile si elle est envahie par une puissance étrangère. Notre incapacité à défendre nos frontières, face à l’immigration clandestine aujourd’hui, face à une armée islamiste demain, est en partie due à l’incapacité d’utiliser l’armée. Il y a là comme une dégénérescence affective : on n’ose plus nommer le mal réel et le combattre. On cherche refuge dans le mal fictif, du style discrimination, racisme pour éviter de combattre le mal réel : le terrorisme islamiste, la montée du crime et de la délinquance (quatre fois plus de délits qu’en 1970 : 4,5 millions contre un million), l’invasion migratoire qui détruit la fraternité. Le sociologue américain Robert Putnam a montré que plus un quartier de ville est hétérogène ethniquement, plus le degré de confiance envers ses voisins s’effondre. C’est ce que l’on appelle maintenant la loi de Putnam : plus il y a de diversité, moins il y aura de fraternité. Dans les sociétés homogènes comme l’Islande, on peut laisser sa voiture ouverte et on ne ferme pas sa porte à clé. Dans notre société aux frontières ouvertes, il faut des codes aux portes et boucler sa voiture. On a besoin de mettre des vigiles partout. Ces problèmes de défiance et de fermeture, inhérents à notre société trop ouverte, me paraissent plus importants que les questions purement économiques.

Propos recueillis par l’abbé Guillaume de Tanoüarn

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