Régulièrement, à la fin du mois d’avril, période des bilans et des rapports annuels, sont publiés et commentés les salaires et les primes des patrons des grandes entreprises. Cette fois, le débat fut lancé à l’occasion de l’achat du groupe Darty par la FNAC dirigée par le dynamique Alexandre Bompard. Quand on lit les rapports de près, on constate que les décisions pour les rémunérations sont toujours prises par les conseils d’administration.
Plusieurs systèmes se sont succédé, ces dernières années, pour attribuer des primes importantes à ces grands dirigeants : les indemnités de départ (même en cas d’échec !) ; les « retraites chapeaux » qui ont souvent fait scandale ; actuellement on privilégie les actions gratuites dites « de performance ». La plupart fixent un salaire complété par des primes sous forme d’actions. Selon le magazine hebdomadaire Challenges, la moyenne des salaires annuels des dirigeants du Cac 40 se situe autour de 2,3 millions d’euros. La rémunération du PDG de la FNAC est, tout compris, de 1,8 million. Seulement il dispose, à l’instar de plusieurs grands patrons, d’une « prime » variable pluriannuelle (indexée sur la Bourse) mais aussi d’ « options de performance » permettant d’acheter des actions à un « cours de référence ».
Selon Le Journal du Dimanche qui a pu voir le rapport annuel de la FNAC, en 2015, M. Bompard a reçu 11,6 millions d’euros de rémunération. Ce qui a semblé trop généreux au conseil d’administration qui a rectifié le tir en diminuant les prochaines actions gratuites et ne parle plus à présent de rétribution en cash (qui avait été envisagée).
La rémunération d’un autre grand patron mondialement connu, Carlos Ghosn, a fait encore plus couler d’encre et de salive. L’énergique PDG de Renault et de Nissan (il partage son temps en deux), à un salaire fixe « de base » de 1,23 million d’euros et il bénéficie aussi de primes, d’actions… Le dernier conseil d’administration lui a voté le maintien de son salaire, alors que l’Assemblée générale des actionnaires – sous les pressions et manœuvres du gouvernement, tout spécialement de M. Macron qui avait augmenté la part de l’Etat dans le capital – avait dénoncé, à 54 % des votants, cette décision.
De toute façon ce vote n’était que consultatif. Le conseil d’administration a bien le dernier mot en restant sur ses positions. Il a considéré les progrès très sensibles des ventes dans les deux marques. M. Ghosn cumule donc les deux salaires. Soit un revenu « fixe », en 2015, de 3 millions d’euros. Selon le dernier rapport que le magazine économique Challenges (du 19/04/2016) ainsi que le journal Le Monde (29/04/2016) ont pu consulter, la rémunération globale de ce patron à la double caquette, atteint en tout 7,25 millions pour son poste chez Renault, environ 15 millions avec ce qu’il reçoit chez Nissan. Ce qui est évidemment énorme pour tout un chacun.
Nonobstant, nous récusons la démagogie constante qui attaque sans vergogne les patrons français. Il faut cependant savoir que ce que touche M. Ghosn est comparable à ce que perçoivent les autres dirigeants de marques mondialement diffusées. Ainsi, le patron de Ford a-t-il reçu 16,5 millions d’euros pour la même année (rappelons que M. Ghosn gère en parallèles deux grandes marques).
Certes, nous sommes loin des anciens patrons français des années 1990-2000 qui n’avaient rien changé dans leurs façons de vivre et se contentèrent de très bon salaires sans plus : Louis Gallois ou François Michelin par exemple. C’est différent aujourd’hui.
Pour Carlos Ghosn, comme pour ses concurrents, il faut tenir compte des résultats de leurs décisions et d’abord des conséquences sociales et économiques. Les deux sociétés dont il a la responsabilité dégagent en tout un chiffre d’affaires de 120 milliards d’euros.
PS : Au nom de Nissan, il vient d’acheter 34 % du capital de son concurrent (surtout pour les tout-terrain) Mitsubishi.
… Et quelques autres
Les salaires des grands industriels sont à comparer avec d’autres encore plus hauts, ceux des footballeurs. Exemples donnés par Philippe Carhon (pour 2015) : en France, Angel Di Maria (PSG), 24 millions d’euros ; Thiago Silva (PSG), 27,5 millions ; Zlatan Ibrahimovic (PSG), 21,5 millions. En Europe : Lionel Messi (Barcelone), 65 millions d’euros ; Cristiano Ronaldo (Real Madrid), 54 millions ; Karim Benzema (Real Madrid), 17 millions, etc. Comme l’explique M. Carhon, la popularité mondiale de ce sport explique vraisemblablement pourquoi les media qui vivent des retransmissions et des commentaires, négligent de trop évoquer les fortunes des « idoles ».