La France résiste à l’écriture inclusive…

écriture inclusive
Cinglé.e.s

… mais avec mesure, trop de mesure. Et c’est plus grave qu’on ne le croit générale­ment : ce n’est pas seulement l’exquise gram­maire française, déjà torturée par un ensei­gnement inepte, qui est en danger, mais la liberté. Explication.

Lu pour vous dans La Griffe.

C’est le Haut Conseil à l’Egalité entre les hommes et les femmes (HCE) qui a proposé d’instituer la fameuse « écriture inclusive » qui a pour but « une communication sans stéréotype de sexe », histoire de ne pas laisser un sexe l’emporter sur l’autre et, mieux encore, de laisser la place libre aux mul­tiples autres « orientations sexuelles » qui viennent brouiller le monde des « ils » et des « elles », par nature discriminatoire. C’est l’antiracisme ultime.

Parmi les règles suggérées, certaines sont déjà largement appliquées. Ainsi ne faut-il jamais oublier de s’adresser aux deux sexes, de l’inutile « Françaises et Français » au très civilisé « Mesdames, Messieurs ». Féminiser les noms de fonction, c’est un « must » (en bon français) et le restera : la ministre sonne déjà mal pourtant, l’ambassadrice ou la géné­rale renvoient à des temps où le mariage était forcément entre un homme et une femme, écrivaine et auteure sont horripilants (à l’in­verse de poétesse, consacré par les ans), chan­celière (pour parler de Mme Merkel et non de l’accessoire de poussette) sombre dans le ridicule. A quand les « sapeuses-pompières » réclamées il y a quelques années au nom de l’égalité ?

La principale nouveauté est cette torture imposée aux mots en multipliant les formes au moyen de points ou de tirets : « Chers administré.e.s », « Ami.e.s com­merçant-e-s ». Illisible ? Cela n’a pas d’importance. C’est le message qui prime, pas le sens !

Dès septembre, les employé.e.s des édi­tions scolaires Hatier s’annonçaient « fier.ère.s » d’avoir publié le premier manuel inclusif, Magellan, Questionner le Monde CE2. Imaginez la tête de gamins de 8 ans priés de lire (alors qu’ils sont déjà largement illettrés pour cause de méthode globale) : « Grâce aux agriculteur.rice.s, aux artisan.e.s et aux commerçant.e.s, la Gaule était un pays riche. » C’est du super-global, en réa­lité. Le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, a jugé tout cela « très laid » et opposé un heureux interdit à la nouvelle mode. Réjouissons-nous — mais sans oublier que s’il fallait ôter la laideur, les incitations à la débauche, les mensonges, l’idéologie et toutes les autres présentations déstructu­rantes des manuels scolaires français, il n’en resterait pas beaucoup… A quand le vrai nettoyage ?

Une circulaire sur l’écriture inclusive de la main du Premier ministre Edouard Phi­lippe vient de bannir l’écriture inclusive des textes officiels, ce qui est bien, mais en se soumettant quand même au politiquement correct puisqu’elle présente le masculin comme une forme «neutre»… ce qu’il n’est pas. A en croire mes amis masculins en tout cas. Elle conserve les féminisations abusives, et les lourdeurs (écrire « le candidat ou la candidate » quand le candidat suffit).

Le premier rempart est tombé. La route est ouverte vers une nouvelle persécution totalitaire: celle qui déjà s’exerce au Canada ou en Californie où l’usage interdit d’un lan­gage « genré » peut vous conduire au chô­mage, voire en prison.

Jeanne Smits.

La Griffe n°113 de novembre-décembre 2017

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