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Attentats du 13 novembre : entretien avec Philippe de Villiers (extraits)

ByLectures Francaises

Jan 6, 2016
Photo de Philippe de Villiers

Cet extrait est tiré du numéro 704 (décembre) de Lectures Françaises. Commander le numéro

Lectures Françaises : Il reste à vous entendre sur un très gros et très inquiétant « morceau » : l’islam. Votre analyse du phénomène est impressionnante de lucidité et de réalisme, lorsque vous expliquez à merveille pourquoi et comment l’encouragement est donné à « l’islam modéré » pour tenter d’amoindrir l’ « islam radical ». Et vous posez cette question : « Pourquoi les élites européennes, dans leur ensemble, paraissent-elles si tranquilles devant la montée de l’islamisme ? » Les tragiques attentats du 13 novembre dernier viennent, hélas ! de corroborer vos prémonitions. Qu’en dites-vous aujourd’hui ?

Philippe de Villiers : Dans mon livre, je l’avais écrit en toutes lettres : « Nous allons devoir
affronter la guerre que nous ne voulons pas nommer. Et la classe politique va connaître le chaos ». Nous y sommes : la guerre est là. Et le chaos va suivre. Les fautes sont trop lourdes. L’imputation sera terrible. Comment les élites mondialisées pourraientelles en effet s’exonérer de leur responsabilité devant l’histoire, d’avoir installé chez nous, depuis les années soixante-dix, une colonisation à rebours, préparant ainsi les prodromes d’une nouvelle guerre de religion inouïe depuis le XVIe siècle. Les gens qui se sont succédé au pouvoir depuis l’ère giscardienne et maastrichtienne ont failli. La France officielle qui a importé au coeur de notre pays, une autre nation, a vécu sur deux principes : un « espace sans frontières », au nom de l’hubris européen ; et une « société multiculturelle », au nom de l’idéologie mondialiste. On nous a expliqué, pendant vingt ans, que « les frontières étaient inutiles ». Aujourd’hui, il y a 5000 kalachnikovs qui, après un long voyage, dorment sagement dans les caves des « territoires perdus de la République ». Personne n’en a contrôlé l’entrée. On y trouvera bientôt des stocks de gaz sarin. Il y a aussi 3000 kamikazes – selon nos services de renseignement – qui vont et viennent sans souci pour aller chercher en Belgique ou en Syrie leurs ceintures explosives. Et voilà que soudain, on nous dit « On va fermer les frontières ». Il faut se pincer pour être sûr d’avoir bien entendu. Le salto arrière est impressionnant. Aucun mea culpa. La médiacaste éberluée s’extasie : « va pour les frontières ! Chapeau l’artiste ! ». Il faudra des années pour reconstituer une infrastructure douanière. Que de temps perdu ! De la même manière, depuis vingt ans, au nom du multiculturalisme, on a voulu en finir avec la fameuse « assimilation » des étrangers. C’était un « concept désuet ». Il fallait « insérer », « intégrer ». Et on a désintégré et assimilé à l’envers les petits Français de souche au mode de vie halal.

L. F. : Ces attaques qui ont frappé en plein coeur de Paris, ne sont-elles pas le signe que dans les desseins des dirigeants du Djihad, la France est une des cibles prioritaires ?

Ph. de V. : Le laxisme consenti durant ces dernières années a changé le visage de la France ! Dans certains quartiers, dans certaines villes, il suffit de descendre dans la rue : il y a des voiles partout. On a inscrit dans nos paysages, avec la « mixité sociale », la « politique de la ville », un damier communautaire. Les hommes politiques savent que, selon la loi de l’islam, l’humanité entière est destinée à se reconnaître musulmane, à se soumettre au Dieu du Coran. La bipartition du monde impose le Djihad : il y a le monde islamisé – le Dar El Islam !– « la maison de la paix». Et il y a le monde à islamiser – le Dar El Harb – « la maison de la guerre ». Pour les « jeunes Croyants », imprégnés de sourates, et ceinturés d’explosifs, qui ont frappé à Paris, depuis Molenbeek et la Syrie, la France doit être islamisée puisqu’elle fait partie du Dar El Harb. Il y a un autre mensonge qui vient d’expirer sous nos yeux dans le Paris ensanglanté : nos élites ont voulu nous faire croire que la « laïcité droit-de-l’hommiste » était une réponse suffisante – et même la seule réponse convenable – à la gangrène djihadiste. Or, on voit bien ce qui se passe aujourd’hui : les laïcards font le vide et les islamistes le remplissent. Ils nous frappent parce qu’ils nous méprisent. Le nihilisme occidental, prenant congé d’une chrétienté flageolante, s’exprime comme une neutralisation religieuse de l’espace public.

L. F. : Que peut-il advenir désormais de notre pays ainsi sauvagement meurtri ?

Ph. de V. : Il faut rendre le pays à ses fiertés. Et sortir aussi la France du protecto rat américain où elle s’abîme. Nos élites sont veules. Elles obéissent à Washington où elles vont chercher consignes et argent de poche. A cause de l’Amérique, nous avons lâchement abandonné les Chrétiens d’Orient. Il faut un renversement d’alliance : sortir de l’OTAN et ouvrir un partenariat avec les Russes, faire la grande Europe de l’Atlantique à l’Oural, l’Europe des chrétientés charnelles. Quelle tristesse ! Le bain de sang, le grand deuil… Tant de larmes… Et puis la torpeur… l’incompréhension, parfois la prostration. Tant de gens qui ont cru à la fable du « vivre ensemble » et au slogan « l’islam, religion de paix », ainsi qu’à l’impératif catégorique à l’intention des islamo-sceptiques : « pas de stigmatisation ! Pas d’amalgame !». La France pleure. Nos coeurs saignent. Nous pleurons sur les Français et sur la France. Sur ce pauvre pays si cher, qui enterre les victimes d’une religion de conquête et que nos politiciens n’ont pas su protéger, par lâcheté, par inconséquence et par une détestation hystérique de la France chrétienne. Au surlendemain des attentats, le président des Maires de France, M. Baroin, a demandé qu’on expulse de l’espace public les crèches de Noël. Et pourtant, dans les noirceurs de cette tragédie, s’est allumée une petite lumière. Bientôt émergera le carré de la dissidence. Un jour viendra – peut-être un jour prochain – où des milliers de mains vont se tendre les unes vers les autres. Des mains qui ne se connaissent pas. Fragiles, hésitantes. Celles des jeunes branchés du vendredi soir, agressés les premiers et dont la colère les portera vers la vérité. Leurs parents soixante-huitards leur avaient dit : « il n’y aura plus jamais de guerre ». Maintenant, ils savent. Un peu plus loin, il y a d’autres jeunes, qui vivent tapis dans les banlieues et qu’on appelle les « petits blancs ». Ceux-là n’en peuvent plus de baisser la tête et de longer les murs. Ils regardent aujourd’hui les terrasses ensanglantées, ils se sentent frères de détresse sinon de mode de vie avec les morts du Bataclan. Eux aussi vont se redresser en criant : « On est chez nous ! ».

Cet extrait est tiré du numéro 704 (décembre) de Lectures Françaises. Commander le numéro

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