« Créer une intelligence artificielle serait le plus grand événement de l’histoire humaine, disait Stephen Hawking en 2014, malheureusement, ce pourrait aussi être le dernier ». Ces mots sont encore aujourd’hui brûlants d’actualité. Si une telle déclaration n’était pas pour effrayer les adeptes de l’idéologie du progrès au regard des profits colossaux qui se dessinaient déjà derrière cette technologie fascinante de l’IA, elle a cependant permis à un certain nombre de scientifiques de prendre conscience du fait qu’ils étaient en train d’ouvrir une boîte de Pandore.
De nos jours, il semble que nous ne puissions plus aborder le sujet sans que les passions se déchaînent : de l’engouement au rejet le plus absolu, de la fascination à l’angoisse. En effet, certains s’enthousiasment de la puissance que pourrait déployer une telle technologie tandis que quelques lanceurs d’alertes n’ont de cesse de dénoncer les conséquences éthiques et politiques qu’engendrerait la création de ces intelligences synthétiques. Mais la plupart, ou du moins beaucoup de ceux qui épiloguent sur le sujet ignorent tout de cette technologie, de ses fonctionnements internes et de ses véritables possibilités.
Voyage au bout de l’IA est une réponse d’Axel Cypel au besoin de plus en plus répandu de se faire une opinion éclairée sur le sujet. Selon lui, la publicité faite à l’intelligence artificielle, notamment par les films de sciences fictions, mais aussi par la publicisation d’outils tels que Chat GPT et l’emploi d’un vocabulaire humanisant pour la désigner, lui ont attaché une image très éloignée de la réalité. En effet, étant confronté à des IA finalisées, et n’ayant aucune connaissance des procédés utilisés, le grand publique croit voir se déployer une véritable intelligence synthétique, jumelle de l’intelligence humaine, alors qu’elle en est en fait très éloignée, de par son fonctionnement comme de par ses possibilités.
Axel Cypel cherche donc à éclaircir les aspects obscurs de l’intelligence artificielle en présentant un bref panorama historique de son développement et son fonctionnement général dans les deux premiers chapitres. On y comprend notamment que l’humanisation de l’IA vient plus de l’impact marketing de ce sigle que d’une réelle ressemblance avec l’intelligence. Dans les trois chapitres suivant, il s’attache à expliquer la création et l’utilisation des outils les plus utilisés pour programmer l’IA, ainsi que les raisons de leur succès. On y comprend notamment la véritable place de l’IA par rapport à l’homme. Les deux derniers chapitres sont consacrés aux risques et aux limites de l’IA.
Voyage au bout de l’IA apparaît comme un ouvrage très complet pour saisir les ressorts de l’Intelligence artificielle et ses enjeux contemporains. Gilbert Saporta rappelle dans la préface cet aphorisme de Pierre Dac pour rappeler ce que peut et ne peut pas faire l’IA : « Les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu’elles concernent l’avenir ». Cela vaut pour les IA, elles font des généralisations à partir des données du passé qui les rendent précises, mais ni intelligentes, ni infaillibles.
Éditions De Boeck Supérieur, octobre 2023, 192 p., 17,90 €
Thibault Gallouëdec
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