L’Europe existe bien avant l’Allemagne (1871 : création de l’Allemagne telle que nous la connaissons). Jamais on n’a cessé d’assister à des tentatives réitérées de la part des peuplades Nord-Européennes, (invasions des tribus germaniques ; Alamans, Francs, Burgondes, Wisigoths etc…) d’extension sur les 4 points cardinaux. Le peuple allemand a toujours eu un tempérament belliqueux et conquérant (malgré Tolbiac). Pie XII a merveilleusement retracé les contours (cf : Mit brennender sorge, encyclique du 10 mars 1937). Aujourd’hui, il détruit, fidèle à sa nature, une Europe déjà fragilisée par la définition et les conséquences pratiques d’une idéologie mondialiste et économiquement tyrannique.
Lu dans CONFLITS :
Angela Merkel, fossoyeur de l’Europe ?
Derrière les postures et les déclarations de bonnes intentions, la crise migratoire initiée par Berlin et à laquelle fait face l’Europe depuis près d’un an marque un tournant dans la construction européenne. Elle porte en elle aussi une défiance croissante des nations de l’Europe à l’égard d’une Allemagne entendant désormais imposer ses vues au reste du continent.
En ouvrant toutes grandes les portes de l’Europe, Berlin n’a pas seulement déstabilisé la société allemande, elle a conduit la plupart des pays européens à se refermer. Les frontières se sont peu à peu closes, y compris dans des pays pourtant considérés comme tolérants vis-à-vis de l’immigration, à l’image de la Suède. En Europe centrale, la contestation contre ce qui est perçu comme une volonté hégémonique de l’Allemagne a refait surface, de la Hongrie à la Slovaquie en passant par la Pologne. Ailleurs, comme en Autriche, en Italie ou en France, pays traditionnellement favorables à un renforcement de l’Europe, les restrictions temporaires à la liberté de circulation s’installent dans la durée.
En imposant ses vues à l’Europe et en décidant unilatéralement que l’Europe devait accueillir les centaines de milliers de vrais et faux réfugiés qui souhaitaient s’y établir, la chancelière Angela Merkel a détruit ce qui marchait finalement le mieux au sein de l’Union européenne et représentait une avancée concrète pour ses citoyens, à savoir la liberté de circuler sans restriction partout (ou presque) à l’échelle de notre continent.
Cette crise majeure est naturellement destructrice pour le projet européen, et va au-delà de Schengen. Les pays d’Europe, et notamment ceux de sa partie centrale, récusent désormais les renoncements de souveraineté que Bruxelles leur a imposés. Les veilles nations et leurs peuples se réveillent également et se font critiques du fonctionnement de l’Europe, dévoyés de plus en plus selon eux dans ses principes fondateurs.
Ce qui est en cause aujourd’hui, finalement, c’est le leadership et les orientations que l’Allemagne souhaite imposer en Europe. Il porte en soi la dislocation de l’Europe. Seule l’émergence de vrais contrepoids permettrait un rééquilibrage des pouvoirs sur le continent mais ni la France, ni l’Espagne, ni l’Italie ne sont aujourd’hui en capacité d’y répondre, la Grande-Bretagne ayant quant à elle pris le parti de quitter le navire européen lors du référendum de juin dernier.
Pascal Lorot,
Président de l’Institut Choiseul,
directeur de la revue Géoéconomie.
CONFLITS, n°11, octobre-novembre-décembre 2016