Entretien avec Jacques Bernot
« Clemenceau se trompait : la Révolution française n’est pas un bloc »
Jacques Bernot
Lecture et Tradition : Vous avez récemment publié une biographie de « Madame de Tourzel, gouvernante des enfants de Louis XVI » [1] que vous avez dédicacée à Chiré lors des dernières Journées Chouannes. Est-ce la première biographie écrite sur ce sujet ?
Jacques Bernot : En effet. Vous savez que l’un de mes soucis lorsque j’écris une biographie c’est que rien n’ait été écrit précédemment sur le sujet. Pour Madame de Tourzel, c’est exactement cela : c’est le premier travail biographique. Il y avait eu les Mémoires de Madame de Tourzel et celles de sa fille, Pauline de Béarn, publiées au XIXe siècle, mais, depuis, plus rien. Cela explique l’intérêt porté par le public à mon travail.
Oubliée, Madame de Tourzel figure pourtant dans les premiers rangs parmi les acteurs de la tragédie qu’a représentée la Révolution française dans ses débuts. Issue des familles les plus huppées de la cour, elle fait un riche mariage et jouit de la douceur de vivre dans son château d’Abondant, aujourd’hui dans l’Eure-et-Loir. Veuve à 37 ans, déterminée et sérieuse, elle veille attentivement à l’éducation puis au mariage de ses enfants, ce qui lui vaut l’estime de la cour. Gouvernante des enfants de Louis XVI et de Marie-Antoinette après la prise de la Bastille, elle est présente lorsque les souverains quittent Versailles en octobre 1789, lors de la fuite ratée vers Montmédy en juin 1791 et enfin lors de l’émeute du 10 août 1792. Elle suit la famille royale dans son internement à la tour du Temple. Incarcérée peu après à la prison de la Force, sa vie ne tient qu’à un fil alors que la princesse de Lamballe est massacrée. Elle en réchappe. Le Directoire puis l’Empire la surveillent… Ses Mémoires, publiés quarante-six ans après sa mort, sont une suite d’analyses pénétrantes de la situation et conjugués aux Souvenirs de sa fille, concrets, réalistes et chargés d’anecdotes, m’ont donné l’envie de reconstituer la personnalité courageuse, lucide et modeste de cette dame de haut parage.
« Elle dut son salut à sa présence d’esprit incroyable, à cette noble et courageuse franchise qui frappa d’étonnement ceux qui s’apprêtaient à devenir ses bourreaux. Ces cruelles épreuves n’affaiblirent point son grand caractère, ne refroidirent pas l’attachement qu’elle portait dans son cœur à ses maîtres malheureux ; dans la suite, vous la reverrez la même : la Reine s’était confiée à sa vertu, sa vertu ne se démentit pas. » (Pauline de Tourzel, comtesse de Béarn, Souvenirs de quarante ans, 1789-1830).
(LIRE LA SUITE DANS NOTRE NUMÉRO)
Propos recueillis par la rédaction
[1] – Nouvelles Éditions latines, 2022, 372 pages, 19 €.
Cet extrait du numéro 788 (décembre 2022) de Lectures Françaises vous est offert. Pour lire la suite, commandez le numéro ICI !