Lors des funérailles de son ami le cardinal allemand Joachim Meisner, le 15 juillet, Benoît XVI a dénoncé « la dictature de l’esprit du temps » qui règne dans l’Eglise et qui la menace de la faire « chavirer ».
Lu pour vous dans Présent.
Le cardinal Meisner, ancien archevêque de Berlin et de Cologne décédé le 5 juillet dernier, était un ami du pape émérite Benoît XVI et aussi un des quatre cardinaux signataires des fameuses dubia à propos de l’exhortation apostolique Amoris laetitia.
Ainsi, quand, lors de ses obsèques célébrées le 15 juillet en la cathédrale de Cologne, Mgr Gänswein a lu le message de Benoît XVI, certains y ont vu une critique de la direction prise par l’Eglise sous l’impulsion du pape François : « La chose qui m’a le plus ému, c’est la manière dont il a vécu la dernière période de sa vie avec la certitude toujours plus profonde que le Seigneur n’abandonne pas son Eglise même si parfois la barque se remplit d’eau jusqu’à être sur le point de chavirer. »
Cette phrase a été beaucoup reprise et interprétée, ce qui a poussé Mgr Gänswein, préfet de la maison pontificale et ancien secrétaire particulier du pape Benoît XVI, à réagir dans le journal italien Il Giornale le 18 juillet, en qualifiant la polémique de stupide : « Le pape émérite a été volontairement instrumentalisé. Avec cette phrase il ne faisait allusion à rien de précis, il parlait de la situation de l’Eglise d’aujourd’hui comme du passé avec une barque qui ne navigue pas dans des eaux tranquilles. François dit la même chose. »
Il n’empêche qu’au jour de sa mort, Mgr Meisner, au même titre que les autres signataires des dubia, n’avait toujours pas reçu de réponse de l’actuel évêque de Rome. Les mots du prédécesseur de ce dernier raviveront aussi les doutes de certains vaticanistes sur les raisons de la renonciation de Benoît XVI en 2013, tels ceux régulièrement exprimés par le journaliste catholique italien Antonio Socci (près de 66 000 fans sur sa page Facebook officielle) qui s’obstine à appeler François par le nom de Bergoglio.
Pour rappel, le pape François avait justifié son refus de répondre aux dubia signées par les cardinaux Raymond Burke, Carlo Caffarra, Walter Brandmüller et Joachim Meisner parce qu’elles étaient pour lui une démonstration de « légalisme » et de « rigorisme » et une critique « entraînée par un esprit mauvais pour susciter des divisions ».
Tels ont été les mots très durs du Saint Père après que les cardinaux eurent décidé de rendre publics le 14 novembre dernier leurs cinq demandes d’éclaircissements à propos d’Amoris laetitia. Pourtant, la multiplication des interprétations très divergentes selon les pays de l’exhortation apostolique de François quant à l’accès à la communion des personnes divorcées vivant dans une nouvelle union montre bien que tout n’est pas clair pour tout le monde.
Et loin de considérer que son ami Joachim Meisner était animé d’un esprit mauvais, Benoît XVI a rappelé, dans son message lu aux funérailles de Mgr Meisner, que lorsque le cardinal avait été retrouvé mort dans sa chambre, « le bréviaire était dans ses mains. Il est mort alors qu’il était en train de prier, en regardant le Seigneur et en parlant avec lui. Une mort qui démontre encore une fois comme il a vécu, en présence du Seigneur, et en conversation avec lui ».
Olivier Bault.
Présent n°8912 du samedi 29 juillet 2017