Le fulgurant destin du chevalier de Limoëlan. Entretien avec René d’Ambrières

Le fulgurant destin du chevalier de Limoëlan. Entretien avec René d’Ambrières

Claude Jacque : Barbey d’Aurevilly écrit dans un de ses romans : « l’Histoire manque aux chouans. Elle leur manque comme la gloire et comme la justice… »

Que penser de cette affirmation ? Est-ce pour réparer cette injustice que vous avez pris la plume ?

René d’Ambrières : Personne ne peut plus dire aujourd’hui que l’histoire des chouans n’est pas connue. Pour ce qui concerne la Vendée beaucoup de monuments et d’initiatives perpétuent ce souvenir : le mémorial de la Vendée aux Lucs-sur-Boulogne inauguré en 1993 par Soljenitsyne, le Puy du Fou, le film « Vaincre ou mourir » sorti en 2023 etc., mais il n’en reste pas moins vrai que d’autres épisodes de la chouannerie de l’Ouest, comme la troisième chouannerie de 1799, mériteraient plus de visibilité historique.

Mais pourquoi y voir une injustice ? Il faut surtout que ceux qui sont dépositaires de ces connaissances prennent leur plume ou leur micro pour mieux les diffuser. C’est bien un des buts de mon livre que de faire vivre une partie de cette mémoire. En effet « le roman national » se construit beaucoup à l’écoute des historiens et s’enrichit des nouvelles approches et des spectacles historiques.

Quant à la gloire, la chouannerie de 1799 n’en manqua pas non plus, effaçant en quelque sorte le désastre de Quiberon. Les prises de Nantes, du Mans, de Saint-Brieuc et même de Pacy-sur-Eure furent des faits d’armes impressionnants, bien qu’elles ne furent que très éphémères faute de logistique. En 1799, la conférence de Pouancé montra que Bleus et Blancs discutaient face à face et d’égal à égal. Mais cette chouannerie de Bretagne et de l’Ouest reste probablement moins connue, qu’elle le devrait.

Cl. J. : « Une biographie réussie, c’est un roman.» On peut dire que la vie de ce personnage est un vrai roman d’aventure ; est-ce ce qui vous a poussé à écrire Le Fulgurant destin du chevalier de Limoëlan[1]?

R. d’A. : L’intérêt et le caractère romanesque de cette biographie furent effectivement le moteur de mon projet, mais ce qui l’a alimenté et ce qui m’a permis d’arriver au bout de cet ouvrage, c’est la richesse des sources tant françaises qu’américaines. Trouver un sujet passionnant et pouvoir accéder à de riches archives conduit assez naturellement à l’écriture.

Ceci n’est toutefois pas sans piège, car lorsqu’il y a des blancs dans l’histoire ou des manques dans les sources, que faire pour assurer la continuité du récit ? Plusieurs attitudes sont possibles, compléter voire broder avec un style agréable, qui ne laisse pas le lecteur sur sa faim, ou au contraire poursuivre encore  les recherches et échafauder les hypothèses les plus crédibles en ne craignant pas de les faire partager au lecteur. Et si l’on tente de s’aventurer dans les pensées du héros, le risque de s’égarer devient alors permanent. C’est pourquoi la frontière entre le roman historique, la compilation et la rigueur scientifique n’est pas aussi étanche, qu’on pourrait le croire. (LIRE LA SUITE DANS NOTRE NUMÉRO)

Claude JACQUE

[1] – Éditions Via Romana, août 2023, 250 pages, 24 €.

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