Manuel Valls tente de trouver sa place dans l’ère post-Hollande, mais il fait face à un nouveau président de la République impitoyable… et bien trop heureux d’humilier son ancien rival !
Lu pour vous dans Le Bulletin d’André Noël
Parmi les nombreux perdants du scrutin présidentiel, il y a Manuel Valls dont l’actualité politique a quelque peu gommé la silhouette du paysage électoral. C’est peu de dire qu’il n’est pas satisfait de cet effacement ; il s’imaginait un grand destin post-Hollande, être un gagnant et non pas un perdant. C’est pour cela qu’il a quitté Matignon après avoir menacé le chef de l’Etat de se présenter contre lui s’il avait l’intention d’être à nouveau candidat.
Le problème est qu’Emmanuel Macron était animé de la même intention et avec un positionnement politique proche du sien puisqu’il s’agit d’une autre variante du hollandisme. Mais son ancien ministre de l’Economie a pris une longueur d’avance sur lui en quittant plus tôt le Titanic gouvernemental. Valls croyait pouvoir compenser cette antériorité par la légitimité en participant aux primaires de gauche, Macron étant alors dénoncé comme un aventurier individualiste. Las !
L’ex-premier ministre minimisait la déception du peuple de gauche qui lui a préféré un frondeur, Benoît Hamon. Que faire maintenant pour sa carrière ? Il s’accroche de façon pathétique à son rival d’hier. Il lui fait des offres de service qui sont repoussées sans ménagement. Il est vrai que lorsqu’ils étaient ensemble au gouvernement, leurs relations n’étaient guère harmonieuses ; ils étaient déjà rivaux pour la succession de Hollande.
Valls a rogné les ailes de son rival en rabotant sa loi, dite Macron II, ce qui a suscité la colère de son auteur et, finalement, son départ du gouvernement. Macron avait demandé l’arbitrage de Hollande qui, comme à son habitude, a laissé traîner les choses, avec l’objectif que les deux ministres qui voulaient prendre sa place se neutraliseraient l’un l’autre. Excédé des atermoiements présidentiels, Macron est parti. Premier round en faveur de Valls, le deuxième pour Macron.
Le troisième, pense Valls sera pour lui. Il a expliqué au noyau des partisans qui lui restent, puis publiquement : « Emmanuel Macron aura besoin d’une majorité présidentielle forte pour gouverner » et il se fait fort d’être le pilier de cette majorité-là ! Il pense qu’En Marche n’aura pas la majorité absolue à l’Assemblée nationale et que, parmi ses députés, ceux qui viennent de la droite et du centre ne seront pas fiables, étant prêts à abandonner la majorité nouvelle à la première difficulté pour retourner à leurs amours anciennes.
D’où la nécessité de s’appuyer sur des élus de gauche, socialistes, certes, mais d’abord vallsistes puisque ceux-là sont plus proches de Macron que les frondeurs et autres mélenchonistes. Il propose donc son «aide» (sic) à Emmanuel Macron, quoique ce soit lui qui ait plus besoin de l’aide de son ancien ministre dans les circonstances actuelles.
Toutefois le président d’En Marche ne l’entend pas de cette oreille, il ne veut faire aucun cadeau à celui qui, pas son obstruction, l’a empêché d’appliquer la politique qu’il voulait au gouvernement. L’ancien premier ministre veut être un partenaire privilégié ? Pas question ! Il sera traité comme un des nombreux hommes politiques qui frappent à la porte de Macron pour obtenir une investiture. Si Valls, à Evry, se présente sous l’étiquette PS, il aura un candidat d’En marche contre lui.
Sur RMC, Emmanuel Macron, a été on ne peut plus clair (pour une fois !) : « Si Valls est prêt à quitter le PS, il n’y aura pas de candidat majorité présidentielle en face de lui à Evry. La question lui sera posée de savoir s’il est prêt à s ‘inscrire dans cette majorité présidentielle et à porter les couleurs de celle-ci. Il sera dans cette majorité s’il est cohérent avec cette majorité. » Mais, même dans ce cas, que l’ex-premier ministre ne se fasse pas d’illusion a ajouté Macron : « Il ne sera pas au gouvernement parce qu’il faut renouveler. »
Le Bulletin d’André Noël n°2516 du 8 au 14 mai 2017.