Brossées à grands traits au cours de l’année passée, elles ont visé d’abord à redonner confiance aux électeurs à l’égard des mœurs parlementaires. Personne n’a oublié la manœuvre effectuée de main de maître par M. Macron et ses alliés qui ont si bien distillé chaque semaine les maladresses du candidat Fillon qui, de ce fait, ne put parvenir au second tour. Pour l’essentiel, elles consistaient à profiter des failles ou non-dits des règlements gérant les assemblées parlementaires à propos de l’emploi des membres des familles d’élus comme assistants parlementaires.
Depuis un siècle et demi, elles avaient connu des entorses autrement plus douteuses sans changer pour autant les règles du jeu. On ne parlait alors pas de déontologie mais d’honnêteté. Cependant les juges estimèrent F. Fillon coupable. Il s’est retiré de la politique. La morale en sort-elle triomphante ? Pas sûr. Le nouveau pouvoir exige des élus de montrer des pattes plus blanches que blanches. De mai à septembre, les parlementaires ont donc travaillé sur la déontologie. De septembre à décembre, ils durent promulguer de nouvelles règles concernant l’utilisation et le contrôle de l’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM).
Le député français perçoit un « salaire plus indemnités » de 7 142 euros par mois ; en sus, lui est attribuée une IRFM de 5 373 euros pour couvrir les frais exclusivement liés à son mandat (plus de 6 000 euros pour les sénateurs). C’est cette IRFM qui devrait être davantage contrôlée. À partir de ce mois de janvier, il faudra fournir des justificatifs pour être remboursé. Déjà avec la loi de « moralisation », a été supprimée la réserve parlementaire et affirmé l’interdiction des « emplois familiaux ». Le 8 novembre, le bureau de l’Assemblée a adopté la fin du régime spécial de la retraite des députés, et l’alignement sur le droit commun de leur allocation-chômage.
Après moult discussions, il a été arrêté qu’un député pourra dépenser librement 600 euros, pour le reste, il lui faudra fournir des justificatifs. Cela veut dire qu’auparavant, la totalité de l’IRFM était laissée à la discrétion du parlementaire ! Sans vérification. Je comprends que certains aient pu succomber à la tentation.
Quelques élus ont ronchonné à propos de la perspective de la présentation sur un tableau Excel de leurs dépenses avec justificatifs. Le contrôle sera effectué par la déontologue qui devra décider des dépenses remboursables et les autres (sic). Les députés vont jouer à l’épicière. Ils ont aussi joué au méchant patron : avec le renouvellement de l’Assemblée en juin dernier, le Palais Bourbon a été le théâtre d’une partie de chaises musicales. 1 405 collaborateurs parlementaires ont été licenciés. Cette décision a coûté la broutille républicaine de 36 millions d’euros selon la questure de l’Assemblée. Certains ont été licenciés sans préavis. Parions que si d’autres patrons avaient agi ainsi, les députés auraient été les premiers à les vouer aux gémonies. ♦
Pierre ROMAIN