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Dans les prisons d’Angers sous la Terreur (1793-1794) – Entretien avec Jean-François Couet

Dans les prisons d’Angers sous la Terreur (1793-1794) – Entretien avec Jean-François Couet

Angevin de naissance, Jean-François Couet est professeur d’histoire-géographie au Lycée Français International de Bangkok (Thaïlande). Lui qui n’a jamais oublié sa région, a travaillé pendant huit ans sur les archives qui permettent de retracer ces événements et de ressusciter le souvenir de leurs victimes.

Lectures Françaises : Vous avez réalisé de longues et patientes recherches d’archives pendant huit années, travaux qui ont dû occuper votre temps libre ?

Jean-François Couet : En fait j’avais déjà travaillé sur ce sujet dans le cadre de mon mémoire de Maîtrise présenté dans les années 80, mais j’étais resté sur ma faim, conscient de n’avoir traité qu’une part infime du sujet. Je m’étais promis de m’y replonger, mais les hasards de la vie font que vous vous retrouvez un jour professeur d’histoire-géographie au Lycée Français International de Bangkok…

Pendant plusieurs années le projet est donc resté en sommeil, mais l’apparition des clés USB, de la numérisation, d’internet, etc., révolutionna la manière de consulter les documents et de les stocker. J’ai donc pu photographier lors des vacances scolaires d’été, des milliers de documents (environ 30 000) aux archives départementales du Maine-et-Loire, puis les consulter une fois de retour en Thaïlande.

L. F. : Voudriez-vous nous dire quel était votre intérêt initial ? Dans quel but avez-vous poursuivi ces grands travaux ? Et pourquoi publiez-vous maintenant cet ouvrage ?

J.-F. C. : Les lecteurs me demandent souvent, au cours des conférences et des séances de dédicaces dans les librairies, ce qui m’a poussé à écrire ce livre, si terrible et si triste. Le fait que personne n’ait traité ce sujet, à ma grande surprise du reste vu le nombre prodigieux d’articles et d’ouvrages consacrés chaque année à la guerre de Vendée, fut la première motivation. Et puis l’émotion a pris le relais. Elle s’est vite transformée en mission : celle de rendre hommage à des gens, morts sans trop savoir pourquoi, et tués sans trop savoir par qui…

 Enfin, certains signes ont entretenu ma motivation :

  • Ce poème de Lamartine « Pensée des morts », découvert par hasard grâce à une chanson de Brassens, et dont un vers m’a immédiatement interpellé : « Vous qui voyez la lumière, de nous vous souvenez-vous? » Ces gens qui reposent dans les fosses d’Avrillé et partout en Vendée, dont tellement de chapelles rappellent autant d’Oradour.
  • Le nom d’un de mes ancêtres, Claude Couet, parmi les personnes fusillées le 16 avril 1794 à Avrillé, un autre qui suivit les campagnes de Donnissan. Je l’ignorais.
  • Cette observation d’une historienne aux archives départementales qui, intriguée par les documents que je consultais, me dit, quand je lui révélais le titre de mon ouvrage : « Mais vous ne pouvez pas écrire ces horreurs sur Angers! » – « Mais c’est votre réaction qui m’encourage Madame », lui répondis-je.
  • Le fait qu’un jour un ami s’étonna de la présence de la guillotine place du Ralliement. J’ai pu effectivement me rendre compte grâce à un petit sondage, que beaucoup d’Angevins l’ignoraient. C’est d’ailleurs une remarque que j’entends souvent à propos de ce livre : « On ne savait pas ».
  • Cette lettre tombant de la toute première pile de documents que je consultais le premier jour de mon travail de recherches aux archives pour mon mémoire de Maîtrise. Une lettre tellement émouvante d’un mari demandant des nouvelles de sa femme, alors qu’ils sont tous les deux détenus à Angers, et derrière laquelle l’Administration dans toute sa froideur répond qu’il faut lui apprendre qu’elle est décédée. Cette lettre conclut mon ouvrage, comme un clin d’œil au jeune étudiant qui ne se doutait pas de ce qu’il allait découvrir.
  • Ce film sur le facteur Cheval, cet homme qui ramassa toute sa vie des pierres au cours de ses tournées, sans savoir pourquoi, et qui finit par en faire un palais. N’ai-je pas fait pareil ? (LIRE LA SUITE DANS NOTRE NUMÉRO)

Propos recueillis par Jacques VILLEMONAIS

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