Jean-Marie Le Pen : les confessions d’un enfant du XXe siècle

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Quelle vie ! La vie de Jean-Marie Le Pen est encore mieux qu’un roman, elle a été vécue ! C’est toute l’histoire du 101, siècle qui défile dans fils de la nation le premier volume de ses Mémoires. Toute l’histoire surtout d’un homme qui, selon la formule qu’il utilise, n’aura cessé de crier dans le désert en espérant qu’il se remplisse.

Lu pour vous dans Minute.

Il eut tout de même de chouettes moments, ce XXe siècle ! Par instants, à voir Le Pen dérouler sa vie, on se plaît à envier ces périodes où, sans qu’aucune indiscrétion ne soit livrée qui viendrait nuire à telle réputation en notre époque où plus aucun fait d’armes n’est prescrit, on pouvait se trimballer enfouraillé en plein Paris comme d’un continent à l’autre et accueillir la maréchaussée en étant prêt à faire usage de sa pétoire dès lors que les nécessités politiques du moment recommandaient d’avoir cette prudence. « L’époque était assez physique », écrit, pince-sans-rire, Jean-Marie Le Pen, en évoquant une castagne qui lui avait ouvert quelque crâne.

Il n’est pas étonnant que Jean-Marie Le Pen, avec une telle existence qui ressemble parfois à « cigarettes, whisky et petites pépés » et dont il ne nous livre certainement pas tout, se soit lié avec Alain Delon. « Un héros doit être beau », dit Le Pen évoquant De Gaulle, qui, lui, lui parut laid, au contraire de saint Michel, de Philippe Pétain — oui, oui, le Maréchal, réputé d’ailleurs pour avoir plu aux dames — et sans aucun doute de lui-même, dont de nombreuses photos attestent qu’il aime à se montrer torse nu mais dont on ne savait pas que, un jour de 1947 — il n’avait pas 20 ans —, il s’était entièrement dénudé au Parthénon se prenant pour un dieu antique.

Le Jean-Marie Le Pen qui a fait trembler la République à la fin du XXe siècle, c’est aussi, c’est d’abord cela. Un jeune homme tellement plein de vitalité qu’il s’est longtemps cru immortel avant de se dire qu’il était tout de même temps d’écrire ses Mémoires — même s’il prétend les avoir commencés au milieu des années 1970 à Panama, où il s’était rendu, comme il se doit, à bord d’un voilier.

Les après-guerre sont faites pour faire la paix »

Ce qui frappe dans ses écrits, c’est tout à la fois la prodigieuse mémoire de l’enfant de la Trinité-sur-Mer que rien ne prédisposait, hors le caractère mais c’est souvent l’essentiel, à devenir le dernier homme d’Etat que la France ait connu (et il faudra bien qu’elle s’en aperçoive un jour), et l’élégance stylistique alliée à la précision du vocabulaire qui rendent ses vues plus hautes encore. Jean-Marie Le Pen regarde le monde comme il se regarde : avec la distance de celui qui se plaît parfois — souvent — à jouer un rôle mais qui n’est pas dupe. « La politique, après tout, ce n’était peut-être pas absolument mon truc », concède-t-il comme si la réflexion, venant de lui, était anodine.
Alors quoi ? Corsaire du roi ? Il était né trop tard.

Jean-Marie Le Pen, sur toute chose, s’élève tel Montgolfier pour disposer d’un point de vue inaccessible à quiconque ne dispose pas de sa belle ligne de vie ni de cette culture classique que nul ne lui conteste. « Si l’on prend de la hauteur… », écrit-il, puis il déroule le raisonnement tiré de l’observation. « L’expérience est une lanterne sourde qui n’éclaire que celui qui la porte », dit un proverbe attribué à Confucius et Jean-Marie Le Pen n’aura eu de cesse tout au long de sa vie politique et particulièrement durant les décennies où il a présidé le Front national d’essayer de le faire mentir.

« J’étais plutôt, comment dire ? […] Une voix, qui crie dans le désert jusqu’à ce qu’il se remplisse. » La voix d’un tribun qui, ayant tout vu et presque tout vécu, tournait sa lanterne sourde vers son peuple en cherchant à lui faire entrapercevoir la lueur, mais un voix prise aux pièges qu’il était en train de lui dénoncer, celui de la déculturation, celui du simplisme, celui de la perte de mémoire et de tout repère historique, celui de l’invasion de la morale comme seul prisme explicatif. Un monde en noir et blanc s’est imposé auquel Jean-Marie Le Pen, qui avait vécu toute sa vie politique en technicolor, n’a pas su ou pas voulu s’adapter.

« Combattre le mensonge », encore et toujours, telle est la mission qu’il s’assigne en 1955 de retour d’Indochine. «Faire de la politique […] pour combattre le mensonge. Flétrir non seulement le communisme, mais les modérés qui le laissaient faire, les compagnons de route, la sale presse qui s’en faisait complice. Pour les morts, pour les vivants, pour la France, pour les enfants à naître, il fallait rétablir la vérité. »

Jean-Marie Le Pen aurait pu se contenter de mener le combat politique pour lequel il était indiscutablement fait et laisser le soin à d’autres de mener les combats historiques. Il ne l’a pas voulu — et il s’en expliquera certainement dans le tome II — parce que les deux sont pour lui indissociables. « Si l’on regarde les choses d’un peu plus haut », certainement, mais il est des époques où la fréquentation des sommets, comme aurait dit l’un de ses adversaires, est tellement peu encombrée que l’on y est bien isolé, comme banni.

Évoquant la période de l’épuration, Jean-Marie Le Pen écrit : « Les après-guerre sont faites pour faire la paix, panser les blessures et se pardonner réciproquement les offenses. Ma tristesse est que la paix n’ait pas, n’ait jamais été faite. » Puissent suffisamment de Français lire ces lignes, puisse aussi Marine Le Pen les méditer.

Antoine VOUILLAZÈRE

Minute n°2861 du 28 février 2018.

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