Des trente-cinq Capétiens, rois de France, Louis XIV est assurément celui qui a concentré sur sa personne, comme sur son règne les plus violentes critiques. Depuis trois siècles s’est installée la « légende noire » dont les traits sont invariablement les mêmes. Roi orgueilleux, belliqueux, dépensier, débauché, d’une intelligence limité, animé d’un catholicisme de «charbonnier», persécuteur des gentils protestants, des doux jansénistes, Louis XIV régna soixante-douze ans sur un royaume misérable, dont le peuple décimé par les famines et la guerre, mangeait des « racines ».
Tout cela est bien sûr très excessif, quand ce n’est pas gravement erroné, mais ne peut être insignifiant. Du bilan du règne de Louis XIV dépend une vision équilibrée et juste d’une histoire prise en otage par les gardiens de l’orthodoxie jacobine et dont l’enseignement, depuis quelques décennies, a été gravement démantelé.
Depuis plus d’un demi-siècle, une génération nouvelle d’historiens a pourtant entrepris de restaurer l’image dégradée du Grand roi, et de mettre en valeur un règne, qui a porté la France à son plus haut degré de grandeur et d’éclat. Certes le règne de Louis a eu ses ombres, le Soleil ses taches, le roi ses fautes dont les plus graves furent les persécutions anti-protestantes, et une première partie de vie dissolue. Pourtant, on ne peut plus nier aujourd’hui la richesse de l’héritage politique et civilisateur qu’il nous a laissé. Il nous fallait célébrer ce tricentenaire rendre justice à la grande figure de Louis XIV que le philosophe allemand et protestant Leibnitz regardait comme « un des plus grands rois qui fût jamais ».
L’auteur :
Jean-Baptiste GEFFROY est professeur émérite de l’Université de Poitiers et, depuis 1971, rédacteur à Lecture et Tradition et à Lectures françaises.