Macron a, le 8 septembre dernier, dans les jardins de l’École française d’Athènes, réaffirmé sa volonté de réforme mais en des termes particulièrement déplaisants : « Je serai d’une détermination absolue, je ne céderai rien, ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes ».
Lu pour vous dans Rivarol.
À qui s’adresse donc ce message ? Au vulgum pecus, aux sans-dents, au pékin de base, aux « gens de rien » ? Tous des “fainéants”, des “cyniques”, des “extrémistes” ? Ajoutant : « Je l’ai souvent dit et je le disais il y a quelques semaines en Roumanie. D’aucuns faisaient semblant de découvrir cette forme de provocation que j’assume. La France n’est pas un pays qui se réforme. Il ne se réforme pas… parce qu’on se cabre, on résiste, on contourne. Nous sommes ainsi faits ». Notons que Macron s’y entend pour cracher dans la soupe hexagonale depuis l’étranger, on se souviendra des « crimes contre l’humanité » liés à la colonisation goulûment dénoncés à Alger le 14 février 2017.
En tout cas Emmanuel Macron n’y va par quatre chemins. Sa détermination à réformer contre vents et marées — en fait voici quarante ans que l’on réforme à tour de bras avec le succès que l’on constate — semble emboîter le pas à Nicolas Sarkozy lorsque celui lançait une déclaration de guerre, le 17 décembre 2008 à l’École polytechnique de Palaiseau, à ceux qui se refuseraient au métissage obligatoire qu’il entendait imposer, si besoin est par la force de la loi. Lieux analogues, même ton tranchant, dans la forme même rhétorique volontariste et sur le fond même thématique : « fermez-la, le progrès est en marche, et j’incarne le progrès et sa vérité ».
En l’espèce, Macron faisait référence à sa « Loi Travail », laquelle tendrait à faire du labeur — clef de la socialisation des individus de par leur participation à la vie collective — une marchandise comme une autre… car par le biais de cette “loi” le travail acquiert la dimension de quasi variable d’ajustement (de l’emploi) dans le cadre d’une âpre compétition économique mondiale au service exclusif d’intérêts financiers à court terme…
Et via le « Pacte pour l’euro plus », autrement nommé « Pacte pour l’euro, la compétitivité et la convergence » (conclu le 25 mars 2011 entre le président Sarkozy et la chancelière Merkel), qui conduit l’Union à prendre toujours plus d’engagements en vue de renforcer « la convergence économique et la compétitivité ». On comprendra que dans un tel contexte, le travail est appelé à être de plus en plus regardé comme une banale marchandise. Mais cela n’est pas dit ouvertement, il faut savoir lire entre les lignes et pratiquer la complexe arithmétique du discours politique dans et par laquelle 2+2 font 5 !
Croyons cependant Macron lorsqu’il affirme que, les Français étant rétifs aux réformes, il se propose d’engager : « une transformation profonde de la France… Nous allons le faire sans brutalité, avec calme, avec explication, avec sens… La capacité de la France à se transformer, c’est sa capacité démontrée à transformer l’Europe dans le même temps ».
Pour ce qui nous concerne, nous resterons réservés quant à l’absence de brutalité dans la conduite des Affaires… en tout cas le néo-président n’en administre pas la preuve dans sa manière de désigner ceux qui traînent les pieds pour se mettre En Marche dans son sillage. Non seulement son excès d’arrogance naturelle vise à disqualifier d’entrée de jeu ses adversaires, mais en outre il prétend incarner la seule voie possible vers le renouveau, le redressement économique et l’épanouissement sociétal ! Attitude qui n’est pas sans rappeler la sortie de Warren Buffett, l’un des magnats de la finance mondiale, sur CNN, le 25 mai 2005 : « Il y a une guerre des classes, c’est un fait. Mais c’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre et qui est en train de la gagner ».
Français, si vous saviez !
Maintenant allons au fond des choses. La convergence franco-germanique ne porte pas seulement sur la compétitivité et l’“ubérisation” des salariés. Les choses vont beaucoup plus loin. À Athènes Macron a relancé l’idée d’une unité budgétaire de la zone euro, fondée sur un exécutif unique. Un pas de plus vers un fédéralisme européen, soit l’absorption programmée des nations (éclatées ou non), dissoutes dans un ensemble européen toujours plus contraignant et où toute souveraineté aura disparu [CVanneste/bdvoltaire. fr10sept17].
Mais cette marche forcée vers le fédéralisme européen, cette grande transformation passe obligatoirement par la disparition des frontières et leur totale porosité aux migrants extra-européens. En témoigne la charge lancée le 25 août à Varna, en Bulgarie, contre la Pologne, non seulement à propos de la question des « travailleurs détachés », mais surtout de la fermeture ou du contrôle des frontières face à la déferlante migratoire. Là se trouve le cœur du problème, aucun doute à ce sujet, l’Union européenne fédérale ne se fera que sur les décombres des nations, dépecées par le régionalisme et adultérées par la submersion multiculturelle, ethno-confessionnelle ou communautariste…
Car le Grand transformateur Macron prévoit bien, en ce domaine, de s’aligner (là également) sur la politique de Frau Merkel — que d’aucuns qualifient de généreuse… les imbéciles ! —, laquelle avait en 2015 ouvert les portes à au moins un million de “réfugiés” (encore un odieux abus de langage, un de plus), car, dit-il, il faut désormais « que le modèle français se rapproche du modèle allemand. Nous avons des défis communs ». De sorte que le 5 septembre, haranguant le corps préfectoral rassemblé au palais de l’Élysée, le sieur Macron annonçait une « refondation complète » de la politique d’immigration prônant la fermeté pour la future loi qu’il veut voir bouclée début 2018. « Si nous n’agissons pas pour refonder [cette politique] c’est le consensus républicain autour de notre tradition d’accueil et d’asile qui est remis en cause… les seuls gagnants sont les extrêmes ».
Comprendre l’exact contraire de ce qu’il dit
Mais cette refondation consistera-t-elle en une lutte féroce contre l’immigration illégale ? Que nenni ! L’Europe que veut bâtir Macron a trop besoin d’un nouveau lumpenprolétariat sous-rémunéré pour les tâches serviles. Les analphabètes somaliens (que l’on nous vend comme autant d’ingénieurs et de médecins) sont en vérité les véritables élus de la Loi travail… Pour ce faire, là encore nous avons affaire à une transformation, au sens littéral et non à une réforme du droit d’asile qui permettrait de bloquer le flot ininterrompu de migrants en rupture de ban.
Il s’agira en effet de réduire à six mois (quelle fermeté !) le délai d’instruction des demandes d’accueil, de refondre la politique d’intégration, de tenter de reconduire aux frontières (au demeurant de vraies passoires) un plus grand nombre des déboutés du droit d’asile, au reste nul n’y croit guère, souvenons-nous des charters que le ministre de l’Intérieur Charles Pasqua mit en œuvre autour de 1993… Un échec patent, grotesque et coûteux. Au final des velléités et des faux-semblants destinés de toutes les façons à le demeurer parce qu’en matière d’immigration, ceux qui décident en dernier ressort ne sont ni les politiques, ni les préfets, mais les juges.
Or la plupart d’entre eux sortent tout droit de la matrice maçonnique et sont conditionnés à haïr le monde antérieur à l’illumination du monde par la modernité progressiste. « Les juges administratifs, les juges judiciaires ont de facto tous les pouvoirs, à la fois parce que les lois les leur ont donnés, que le Conseil constitutionnel a veillé à ce que les lois leur donnent tous les pouvoirs, et qu’ils interprètent à leur manière, c’est-à-dire d’une manière totalement idéologique, un certain nombre de textes généraux comme la Convention internationale des droits de l’enfant ou la Convention européenne des droits de l’homme… Les ministres parlent en matière d’immigration, mais ils ne gouvernent pas, ce sont les juges qui décident aujourd’hui. Tant qu’on ne touchera pas au pouvoir des juges, on ne fera rien » [JY Le Gallou/bvoltaire7sept17].
Le 4 septembre, Bruno Roger-Petit, nouveau porte-parole de l’Elysée, nous disait tout et le reste dans un tribune du Nouvel Obs : « Oui, la France va changer, comme elle a toujours changé. Oui, les Français de culture musulmane vont rester, ne partiront plus, et ne seront jamais déportés. Oui, les cultures vont se mélanger, comme elles l’ont toujours fait depuis l’Antiquité sur ce territoire que l’on nomme France, d’ailleurs, cela a déjà commencé »…
« Oui, les adeptes du zemmourisme finiront pas s’éteindre, démographiquement donc politiquement remplacés par des citoyens français plus ouverts, en prise avec la mondialisation et les formidables opportunités qu’elle offre, et qui n’auront pas peur. Oui, ce que disait François Mitterrand en 1987 va se réaliser : “Les Français qui viendront après moi, fiers quand même de ce qu’ont été ceux d’avant, considèrent que ceux d’après, ceux du siècle prochain seront plus forts, seront plus riches de culture, seront des Français plus proches de l’universel et donc de la compréhension des affaires du monde, s’ils savent admettre et comprendre les autres cultures pour en faire aussi leur propre culture”. Oui, il y aura un jour, avant la fin de ce siècle, un président de la République française dont le prénom sera Mohammed, ou Ahmed, ou Norredine. C’est une perspective formidable, parce qu’au regard de l’histoire, et contrairement à ce que raconte la fable zemmourienne, ce sera authentiquement français ».
Propos lapidaires qui ont le mérite de la clarté et font écho à ceux de Macron déjà cités : « Ils sont là, ce sont eux nos vrais ennemis, vous les croisez dans les rues, dans les campagnes, sur la Toile, bien souvent masqués, aussi haineux que lâches. Vous les connaissez. Le parti des agents du désastre, les instruments du pire : l’extrême droite française ». Par pitié, ne dites pas (ou plus jamais) que ces gens pèchent par générosité (ignorance ou aveuglement), vous enfonceriez encore davantage le poignard que ces gens ont planté dans le flanc de la Nation…
Léon Camus.
Rivarol n°3296 du 13 septembre 2017.
Suggestion de lectures sur ce thème :