Lectures Françaises

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L’abominable vénalité de la presse française par Henry Coston

ByLectures Francaises

Jan 17, 2016

Reproduction d’un article paru dans Lectures Françaises (février 1969).

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A l’issue du conseil des ministres du mercredi 8 janvier, M. Le Theule, secrétaire d’Etat chargé de l’Information, fil une déclaration qui provoqua un tollé dans la presse : «Il est remarquable et il a été remarqué, a-t-il dit, que les influences israéliennes se font sentir dans les milieux proches de l’Information ».

Répondant aux questions des auditeurs, sur les ondes d’Europe N° 1, le lendemain soir, M. Michel Debré était amené à faire cette constatation : «Nous sommes en démocratie, et la démocratie n’est pas seulement le règne de la liberté au service de la vertu, c’est aussi la liberté au service des intérêts. »

M. Debré découvre l’Amérique

Les lecteurs du «Secret des Dieux» et de nos autres livres savent cela; on est surpris que M. Debré ne s’en aperçoive qu’aujourd’hui. Passons…

«Nous savons parfaitement qu’il y a des intérêts professionnels, nous savons parfaitement qu’il y a des intérêts étrangers qui trouvent, et cela est normal, des avocats. Je crois qu’en évoquant l’existence d’avocats de la cause israélienne. on peut dire qu’il y a aussi, j’en ai connu pendant la guerre d’Algérie, des avocats de la cause arabe, des avocats de la cause russe ou des avocats de la cause américaine, en même temps qu’il y a des avocats de toute une série d’intérêts privés. Il n’y a aucune diffamation à reconnaître un fait, à savoir que, dans un régime de liberté il y a ce qu’on appelle des groupes de pression. »

M. Michel Debré le sait fort bien, lui qui appartenait, en 1958, au groupe de pression politico-financier qui imposa le général De Gaulle aux Français ébahis.

«La liberté de parole, la liberté d’expression, la liberté d’action, peuvent être guidées par des groupes d’intérêts, poursuivit M. Debré. Cela est bien connu, cela est étudié dans les facultés de sciences politiques. Les groupes d’intérêts sont un fait. Et je crois que si certains groupes d’intérêts reposent sur une profession, il y a aussi des groupes d’intérêts qui reposent sur des conceptions idéologiques, et il y a enfin des groupes d’intérêts qui reposent sur des intérêts extérieurs à la nation.»

« Cela s’est toujours fait!»

L’indignation de la grande presse est d’autant moins compréhensible qu’au cours de ces cent dernières années, des exemples de «l’abominable vénalité de la presse française» ont été maintes fois donnés.

Il n’y a pas si longtemps que le journaliste américain Walter Lippmann révélait, à l’occasion d’un affreux scandale, que la C.I.A. — c’est-à-dire les services secrets de la puissante Amérique — «intervint financièrement dans les élections en France et en Italie» et nul ne s’est indigné avec éclat contre semblable affirmation.

Le Canard Enchaîné a, naguère, dénoncé la corruption de certains groupes et de certains journaux par les fonds secrets gouvernementaux. Qui s’en est étonné? Les gens désabusés des deux clans disaient que «cela s’est toujours fait ».

Il est vrai que depuis le scandale de Panama, on n’a plus guère d’illusions, dans le public, sur l’intégrité des milieux politiques et de la presse.
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, la publication des lettres et rapports Raffalovitch révéla que la plus grande partie de la presse française avait émargé, de 1897 à 1917, aux fonds tsaristes. Il s’agissait alors de pousser les Français réticents à accepter l’alliance russe et à vider leur bas de laine au profit du trésor moscovite. La crainte de l’Allemagne aurait pu suffire à justifier la politique de rapprochement franco-russe. Mais la presse a ses raisons…

Les grands journaux touchaient

L’opposition à l’alliance avec Saint-Petersbourg risquant de compromettre le déroulement normal des opérations financières liées à cette entreprise, le conseiller secret à Paris du Gouvernement impérial s’inquiéta. Le 13 octobre 1901, il écrivait au ministre des Finances :

«Quant au moyen de contrecarrer, comme il est impossible d’acheter tout le monde, il faudra faire une sélection, prendre Le Temps, l’Écho de Paris et Le Journal, Le Petit Parisien, quatre ou cinq journaux de province (la Petite Gironde, le Petit Marseillais, le Lyon Républicain, la Dépêche de Toulouse, la Dépêche de l’Est) et traiter (hélas !) aussi avec Poi-datz et Thery pour le Matin et le Petit Journal. Je me demande, sans doute à tort, si ces deux derniers individus P. et Th. ne sont pas liés avec les financiers belges pour mener campagne contre nous et s’ils ne veulent pas se faire acheter préventivement. Il serait peut-être utile et nécessaire de donner des tirages d’amortissement à l’Écho de Paris et au Journal, puisqu’on les a donnés au Figaro. C’est le moyen le plus convenable. »

Dans ses rapports avec les journaux français, Raffalovitch avait recours à des intermédiaires. L’un d’eux, Roels, fut particulièrement efficace :
« Il est incontestable, affirmait l’agent tzariste à son ministre, dans sa lettre du 6 janvier 1902, qu’il a gagné du terrain depuis quelques mois et qu’il a la possibilité de faire passer des dépêches ou des notes dans Le Temps, l’Éclair, l’Écho de Paris, la Liberté etc… et dans quelques journaux de province. Il s’offre, en outre, pour insérer un article dans l’Éclair, dans le Temps.

« Il s’agit de savoir ce que vous désirez faire dans cet ordre d’idées — s’il vous convient de faire paraître (hélas ! à nos frais) des articles dans quelques journaux importants de Paris — articles dont j’aurais la charge d’écrire le texte complet ou en tout cas le canevas. Roels dit que l’article de l’Éclair coûterait un millier de francs, celui de la Liberté 200 à 300 francs. Pour le Temps, Hébrard a eu des prétentions folles ; il a parlé de 10.000 francs, alors que, suivant moi, 1.200 à 1.500, 2.000 au maximum, suffisent.»

Tout à votre service !

Et, plus loin, il ajoutait :

«J’ai vu le directeur de l’Écho de Paris qui promet d’être tout à fait à notre service et qui se contenterait je le suppose, de 3.000 ou 4.000 francs d’annonces… ».

Raffalovitch confessait, le 17 décembre de la même année :

«…Quant aux relations avec les journalistes quémandeurs et affamés, j’en suis profondément dégoûté et écoeuré_ »
Les largesses de Raffalovitch à l’endroit de la presse étaient aussi connues, à l’époque, que celles du baron Edmond de Rothschild à l’égard de certains journaux aujourd’hui. Mais, naturellement, on ne pouvait rien prouver. Ce n’est que beaucoup plus tard que l’on eut des preuves (2)… le 15 mars 1904, Raffalovitch écrivait :

«Je serais d’avis de recevoir poliment mais d’éconduire tous les journalistes et intermédiaires français qui veulent soutirer de l’argent au gouvernement russe. »

Et, quelques jours plus tard, complétant sa pensée, il écrivait à propos d’un ancien gouverneur de la Guyane, haut employé des Rothschild et protégé de Doumer et d’Étienne :

«Il n’y a aucune raison de lui donner 2.000.000 de francs par an pour soutenir l’alliance franco-russe, en achetant les consciences des journalistes français, attendu que ce serait transformer en maladie chronique une intervention accidentelle et que l’on peut arriver à un résultat identique avec moins de frais, dans des conditions plus rationnelles, sans nous démasquer, comme le ferait un bureau permanent à Paris avec un budget de 1.500.000 francs et plus.»

Il y avait parfois des «pépins ». C’est ainsi que, soudain vertueux, Le Petit Parisien, qui avait reçu 40.000 F sur les fonds de publicité financière russe et observé jusque-là une attitude relativement sympathique à l’endroit de la Russie, changea brusquement de ton.

«J’ai immédiatement prévenu M. Noetzlin, écrivait le 27 avril 1904 Raffalovitch au ministre Kokovtzer, et fait venir l’agent qui a été chargé par le Syndicat des banquiers de régler les journaux. Après enquête, il m’a rapporté que c’était pour avoir une augmentation de mensualité.»

Un bilan significatif

Faisant le bilan de ces opérations, Raffalovitch adressait, le 30 août 1904, à Saint-Pétersbourg une note ainsi conçue:

« Pour les six premiers mois, l’abominable vénalité de la presse française aura absorbé (en dehors de la publicité de l’emprunt de 800 millions) une somme de 600.000 francs dont les banquiers ont fourni la moitié… L’intermédiaire qui m’a été recommandé par le représentant de M. Rouvier en février dernier, est M. Lenoir, chevalier de la Légion d’Honneur, qui perçoit 10% de commission pour sa peine.

«Il est dépensé 48.250 francs pour les journaux politiques, 13.300 pour les concours personnels (c’est-à-dire les secrétaires de la rédaction, les rédacteurs financiers, des directeurs de journaux), 15.000 francs pour les journaux de province et les agences ou correspondances, 14.500 pour les journaux financiers.

«L’argent est versé à la fin du mois par les soins de la Banque de Paris et des Pays-Bas au Crédit algérien sur lequel l’intermédiaire émet des chèques. Quelques individus doivent être payés de la main à la main».

La situation de la Russie devenant délicate lors de la guerre avec le Japon, le syndic parisien des agents de change, chargé de certaines relations avec la presse, n’hésita pas à remettre au représentant du gouvernement de Saint-Petersbourg, cette note écrite de sa main et datée du 15 février 1905:

«La Compagnie des Agents de Change de Paris est décidée de ne pas admettre à la cote et à ne pas laisser négocier sur le marché de Paris un nouvel emprunt russe, si le gouvernement russe ne met pas à la disposition de la presse, le cas échéant, pendant toute la durée de la guerre, une mensualité de deux cent mille francs en dehors de ce qu’il fait pour les bulletins financiers. Signé : M. de Verneuil.»

Des millions pour tromper l’opinion

C’est ce même Verneuil qui écrivit au comte de Witte, ministre du Tsar, quelques jours plus tard, alors que des bruits alarmants circulaient en France sur le compte de la Russie:

«Que fait votre gouvernement pour conjurer ce périle ? Rien. ET en vérité, on demeure stupéfait de tant d’inconscience du danger ! Si encore le remède était difficile ou héroïque, je m’expliquerais, sans l’approuver, une pareille inertie. Mais la chose est si simple et si facile qu’il est irritant pour les amis de la Russie de voir gâcher à plaisir une situation financière unique au monde… Et cela quand il suffirait, pour ménager cette réserve inestimable, pour rassurer un peu l’opinion éveillée, de sacrifier par an deux ou trois millions, peut-être moins, répandus dans la presse ! Votre gouvernement ne s’en occupe même pas, alors que ses adversaires s’en occupent si activement… Ne me parlez pas de votre opinion sur la presse et sur le rôle qu’elle joue en cette occasion. Les événements ne comportent pas un cours de morale. Tout ce que nous dirons ne changera pas la situation. La presse existe et il n’est pas en notre pouvoir de la supprimer, elle a une action certaine, plus certaine encore quand les événements vous sont défavorables ; c’est une force que vous n’avez plus le droit de négliger : elle vous le fera bien connaître si vous n’agissez pas.»

Le 4 mars 1905, Raffalovitch mentionnait qu’il avait «fait donner 500 francs au Temps, à la Liberté, à la Patrie, pour que le ton des commentaires du rescrit fût favorable ce soir.»

Contre espèces sonnantes et trébuchantes — il s’agissait alors de francs-or, ne l’oublions pas — Raffalovitch parvenait à se faire obéir de la presse. Le 20 avril 1905, il mentionnait que «le Petit Parisien, l’Écho et le Journal ont supprimé des télégrammes mauvais sur la situation intérieure russe. »

Le vertueux Figaro

Mais il avait des difficultés du côté du vertueux Figaro, ainsi qu’en témoigne sa lettre du 22 avril:

« M. de Verneuil est bien insupportable. N’a-t-il pas dit à Calmette, directeur du Figaro, qu’il l’avait inscrit pour 10.000 francs par mois sur la liste? Et la conséquence a été que Calmette ne s’est pas contenté de 3.000, et qu’il va falloir lui en donner 2.000 de plus.»

Plus tard, le 9 mars 1908, alors que la situation financière de la Russie semblait meilleure, Raffalovitch écrivait à son gouvernement :

«Une chose extrêmement curieuse, c’est l’attitude d’une partie de la presse en France qui veut à toute force obliger la Russie d’emprunter. Quelques-uns le font par conviction, dans l’idée que le moment actuel est meilleur que l’automne, la plupart y poussent parce que le besoin de vivre et de toucher de l’argent les y accule; il n’y a pas de publicité payante et l’emprunt russe en donnera.»

Ayant reçu la visite de l’envoyé des quatre grands de l’époque (Journal, Petit Parisien, Petit Journal, Matin) le conseiller russe écrit en novembre 1912 à Kokovtzev, ministre du Tsar :

«L’idée que M. Laffon est chargé de réaliser, c’est d’obtenir des 22 ou 23 banques russes qui forment le syndicat de la Croix Rouge une participation à fonds communs, avec laquelle on paierait l’appui de la presse française pour soutenir et défendre le marché des fonds russes. L’idée est ingénieuse, mais l’ambition de M. Laffon m’a paru démesurée, lorsqu’il a parlé d’un million de francs à obtenir des banques russes pour la durée d’une année. Je lui ai dit que j’étais sceptique et cela parce que, parmi les participants au fonds de garantie, il y avait des banques auxquelles le marché de Paris n’inspire aucun intérêt… Ils ont calculé, Messieurs les Directeurs de journaux et leurs Agents de publicité, que sur un fonds de 30 millions de roubles, on pouvait distraire 375.000 roubles pour faire paraître des articles favorables à l’industrie et au commerce, aux affaires industrielles introduites à Paris. »

L’accord se fit néanmoins ; il fut renouvelé en 1914 «étant donné le succès manifeste de la campagne».

Raffalovitch notait au passage que si les dirigeants des grands pays européens «sont en général d’une intégrité absolue», ils sont souvent amenés à céder aux pressions d’une opinion publique manoeuvrée par de puissants groupes d’intérêts. Aujourd’hui on parlerait des fournisseurs d’avions; à l’époque, il s’agissait des «marchands d’armes, de plaques de blindage, de munitions (qui) ont recours à un procédé indirect, à l’action sur l’opinion publique par l’intermédiaire de la presse; ils possèdent des journaux, ils en achètent, ils acquièrent des plumes, et les journalistes qui jouent de la note patriotique, qui exaltent les préparatifs militaires des voisins, qui parlent de la menace allemande ou française, se croient des héros…»

Dans l’entre-deux-guerres

Après la guerre de 14-18, l’Action française fit des révélations non moins accablantes pour la presse de l’époque : un grand nombre de journaux émargeaient à Sofia ou à Bucarest, à Belgrade ou à Budapest. Les documents qu’elle publia étaient édifiants.
A la veille du dernier conflit, Charles Maurras, à droite, et Émmanuel Berl, à gauche, ont stigmatisé l’intervention de l’argent étranger dans la propagande belliciste. Tandis que le leader nationaliste prenait à partie Robert Bollack, dispensateur des fonds de corruption de la presse française, le journaliste israélite écrivait :

«L’action de certaines « puissances d’argent », dans les dernières crises diplomatiques est trop éclatante pour qu’on puisse la dissimuler sous les systèmes de mutation ou de dénégation.»

Et s’en prenant directement au directeur général de l’Agence Economique et Financière, chargé de la distribution des 800 millions recueillis auprès des Juifs d’Amérique, Emmanuel Berl ajoutait :

«Que de l’argent, beaucoup d’argent, ait été donné à ce qu’on peut appeler justement «le parti de la guerre », M. Bollack le sait aussi bien que moi» (4).

Quelques années plus tôt, on avait beaucoup parlé de l’aide substantielle que Moscou avait apportée aux communistes français, et quelques mois plus tard l’arrestation d’un rédacteur du Figaro et du secrétaire du groupe parlementaire socialiste révélait que Berlin n’hésitait pas à soutenir financièrement des hommes qui étaient favorables à sa politique. Aux yeux des militants, cet appui financier paraissait légitime, puisqu’il ne s’agissait pas de corrompre, disaient-ils, mais de soutenir des camarades menant le même combat.
C’est aussi ce que pensaient probablement les journalistes parisiens que cite le Dr Urban, conservateur des archives du ministère tchécoslovaque des Affaires étrangères, dans son livre aujourd’hui introuvable : « Demokratenpresse im Lichte Prager Geheimakten» (Editions Orbis, Prague).

Les fonds secrets de Prague

Documents à l’appui, le Dr Urban montre, dans cet ouvrage, que plusieurs journaux et quelques journalistes français, partisans de la politique poursuivie en Europe par le président Benès, recevaient régulièrement des subsides du gouvernement de Prague. Il donne, à titre d’exemple, la photographie de pièces dans le genre de celle-ci rédigée et signée par la directrice d’une importante publication de politique étrangère publiée à Paris:
«Je, soussignée, Mademoiselle X…, certifie avoir reçu de la Légation de Tchécoslovaquie à Paris, un pli du ministère des Affaires étrangères de Prague. »
En marge de ce reçu discret, le ministre avait écrit : «Le pli contenait un chèque de 400 Sterlings, pour 400 abonnements à (ici le titre de la revue) sous le n° 190.091/111/26 et un chèque de 30.000 francs pour Mademoiselle X…, sous le n° 190.092/111/26», ce qui donnait tout son sens à un accusé de réception par trop laconique.

La liste des bénéficiaires des libéralités de Benès est assez longue. Au cours des années 1920-1933, y ont figuré notamment : l’organe officieux de la République, trois agences de presse politico-financières, un quotidien radical, un quotidien illustré du matin et un quotidien illustré du soir, un journal d’exportation, un quotidien financier, le journal vespéral de la bourgeoisie bien-pensante, un quotidien syndicaliste, un quotidien de droite, le grand hebdomadaire littéraire et politique d’un éditeur fameux, un quotidien peu lu par le public mais très largement cité par la presse et la radio (en raison du talent et de la personnalité de son leader), le quotidien le plus lu en France, une revue illustrée du parti communiste, le quotidien d’un maître-chanteur notoire, et diverses autres revues dont l’une avait pour directeur un professeur à la Sorbonne. Les sommes variaient : celui-ci recevait 200.000 francs, celui-là 100.000, cet autre 75.000. Une agence de presse émargeait pour 210.000 francs. Les noms figurent en toutes lettres dans les documents publiés par M. Urban.

Toujours d’après ce sensationnel ouvrage, des enveloppes étaient remises de temps en temps à diverses personnalités dont les interventions satisfaisaient Prague : un grand juriste directeur de publication, un député modéré, un directeur d’agence de presse, un chroniqueur de politique étrangère connu, un journaliste de gauche (rallié depuis à la droite catholique après une courte apparition dans les milieux «fascistes», un journaliste officieux, etc… Le distributeur de ces fonds estimait qu’il était moins onéreux de subventionner directement ceux qui écrivaient que de commanditer leur employeur, c’est-à-dire l’éditeur de la publication où leur articles paraissaient. Il supprimait en quelque sorte les inter médiaires, car chacun sait que les intermédiaires ont les dem longues.

A côté des journalistes honnêtes, il y a les autres…

Pourquoi, sous la Ve République, les moeurs de notre presse auraient-elles changé?

Lorsque MM. Le Theule et Debré mettent en cause l’intégrité de la presse française, ils doivent savoir de quoi ils parlent. La douloureuse affaire algérienne leur a probablement fourni quelques preuves nouvelles de la vénalité de de nos confrères, grands et petits. Nombre de ceux qui protestent aujourd’hui contre l’accusation formulée par les porto-parole de l’Elysée ne dédaignaient pas, alors, les enveloppes de «fonds spéciaux» propres à réchauffer leur zèle pro-gouvernemental.

Les journalistes qui, au grand scandale de nos dirigeants, participent au concert sioniste et prennent systématiquement le parti d’Israël, peuvent être classés en trois catégories.

Il y a, tout d’abord, ceux qui pensent vraiment ce qu’ils écrivent, soit parce qu’ils ont une sympathie marquée pour les victimes de l’effroyable pogrom des années 40, soit parce que leur ressentiment à l’égard des Arabes — en raison des événements d’Algérie — les pousse à prendre automatiquement le parti de leurs adversaires quels qu’ils soient.

Il y a, ensuite, ceux qui sont unis par des liens ethniques. religieux ou familiaux, au monde juif et qui, tout naturellement, mettent leur plume et leur influence au service d’Isarael.

Enfin, il y a les autres, qui appartiennent aux tendances les plus diverses. Ceux-ci sont des malins : ils se sont toujours tenus du côté du manche ; on les a connus maréch sous Vichy, résistantialistes à la Libération, gaullistes à de mai 58, et ils savent bien qu’il n’y a pas de place, dans lac presse actuelle, pour des journalistes ou des hommes de soupçonnés d’hostilité à l’égard de Sion. Sachant bien l’après-gaullisme est proche, pressentant que le Général finalement emporté par la vague de fond déchaînée par propagande israélienne, ils ont pris les devants et quitté navire avant le naufrage.

Ceux-là, hostiles depuis toujours à l’homme du 18 juin, bien qu’ayant paru s’y rallier au lendemain du 13 mai, ayant naguère tonné contre l’ « impérialisme d’Israël » – à ce propos, la lecture de leurs articles de 1956-1957 ou de 1963-1964 est édifiante — ont brusquement changé de camp lorsqu’ils se sont rendu compte que «la droite la plus bête du monde» ne valait pas la peine que l’on se sacrifiât plus longtemps pour elle ; à l’approche de la retraite, inquiets du lendemain, soucieux de se ménager quelques amitiés puissantes, ces «fascistes hitléro-nippons », comme disait notre cher P.-A. Cousteau, ont rallié la bannière d’Israël dans l’espoir que leur bonne volonté les dédouanerait dans les cercles de presse et leur permettrait enfin d’obtenir pour leurs dernières années, la place à laquelle leur indiscutable talent leur donne droit.

D’autres encore, beaucoup plus jeunes, ont compris que pour faire carrière, il ne faut jamais aller à contre-courant, mais au contraire se laisser porter par le flot : sans être phi-losémites, ils sont pro-sionistes pour safisfaire leurs « patrons » du moment, comme ils seraient antisémites si la situation se retournait.

Les soutiens naturels de l’Etat sioniste

De la première catégorie, il n’y a rien à dire. Il faut respecter les hommes qui écrivent ce qu’ils pensent et qui combattent pour leurs idées. Ils ne sont pas si nombreux et ils ont droit à notre respect, même si nous estimons qu’ils se trompent.

La seconde catégorie mérite quelque attention, car elle est influente. On peut y ranger les dirigeants et les rédacteurs de nombre de grands journaux de Paris et de Province ainsi que les animateurs de postes d’émissions radiophoniques. Israélites d’origine ou de confession, ou encore apparentés à des Juifs, ils défendent un point de vue tout à fait légitime. Ils sont certes payés pour le faire, mais ils le feraient probablement bénévolement. C’est le cas notamment de :

Mme Lazurick, née Francine Bonitzer; de Me Garson et de son épouse, gendre et fille de feu Robert Lazurick, patrons de L’Aurore; du Dr Henry Smadja, directeur-propriétaire de Combat; de M. Jacques Rozner, éditorialiste des Echos, le journal quotidien économique fondé par les Servan-Schreiber ; de M. Raymond Aron, rédacteur politique au Figaro et président de la société des rédacteurs du grand quotidien conservateur et libéral; de MM. Robert Salmon, Pierre Lazareff et Charles Gombault, respectivement président-directeur général, directeur général et directeur de France-Soir (dont Paris-Presse, le Journal du Dimanche et France-Dimanche sont les annexes) ; de leurs collaborateurs, MM. Jean Ferinot, gendre d’un Servan-Schreiber, éditorialiste de France-Soir, et Sam Cohen, directeur adjoint de ce quotidien ; de M. Charles-Henry Leconte, directeur du Journal du Parlement; de M. Bernard Lefort (fils de feu Mme Cohen), directeur politique de Paris-Jour; de M. Paul Winckler, directeur général de l’agence Opéra-Mundi Europe et patron de Lectures pour Tous; de M. Robert Salmon (déjà nommé), président directeur général d’Entreprise et Réalités; de Mme Paul Lévy et de M. Thierry Lévy, dirigeants d’Aux Écoutes et de Fortune Française; de M. Jean-Jacques Servan-Schrei-ber, directeur général de l’Éxpress et de l’Éxpansion.

C’est aussi le cas de M. Marcel Dassault, l’industriel de l’aéronautique, fournisseur des « Mirages », et propriétaire de Jours de France; de Mme Edgar Faure, née Lucie Meyer, directrice de La Nef; de M. Jean Bensaid, dit Daniel, rédacteur en chef du Nouvel Observateur ; de MM. Maurice Siégel, directeur général, et Georges Altschuller, chef des services politiques d’Éurope N° 1; de M. Jean-Pierre Farkas, directeur adjoint des Informations de Radio-Luxembourg (R.T.L.), dont M. Jean Ferniot (déjà nommé) est l’éditorialiste du matin.

De Mme Jean Baylet, née Evelyne Isaac, directrice générale de La Dépêche du Midi; de M. Charles Oulmont, directeur des services parisiens de l’Ést-Éclair et du Nouvel Alsacien; de M. Pierre-René Wolf, directeur général de Paris-Normandie, et de M. Bernard Wolf, chef des services politiques parisiens de ce quotidien ; de M. Daniel Mayer, ancien ministre, directeur des Cahiers des Droits de l’Homme ; de M. Gilbert Dreyfus, directeur général d’Éclair Journal, les actualités projetées dans les salles de cinéma; de M. Paul Brauns-tein, directeur administrateur de l’Agence Centrale Parisienne de Presse, qui groupe plusieurs grands quotidiens régionaux de gauche (Le Provençal, la Montagne, Nord-Matin, la Nouvelle République du Centre-Ouest, la République du Var, le Journal du Centre, les Dépêches, le Républicain Lorrain); de MM. Blanchonnet, petit-gendre des Ginzburger, et de M. Cassin, «patrons» d’Ici-Paris; et de beaucoup d’autres.

La publicité est de la partie

La publicité, qui procure à la presse de tout bord, la plus grande partie de ses ressources — le Figaro, par exemple, tire 72% de ses recettes de la seule publicité — est dominée par Publicis, qui distribue chaque année des dizaines de milliards d’anciens francs aux journaux, et par Régie-Presse, qui a le contrôle exclusif de la publicité de plusieurs grands quotidiens tels que France-Soir, l’Aurore, Paris-Presse, le Provençal, le Soir, la République, Presse-Océan, l’Éclair, Paris-Normandie, les Dernières Nouvelles. Ces deux agences appartiennent à M. Bleustein-Blanchet, le « roi de la publicité », qui ne cache pas ses sentiments sionistes. Un autre israélite, M. Raymond Méry, tout récemment encore président de la Fédération Française de la Publicité, préside la Communauté européenne des organisations de publicité et dirige l’Annuaire de la Presse.

Quant aux organismes professionnels de la presse française, qui ont protesté avec vigueur contre les accusations de MM. Le Theule et Debré, ils comptent un grand nombre d’Israélites connus et estimés de leurs collègues. MM. Pierre-René Wolf (déjà nommé) et Manuel Molina sont tous deux vice-présidents de la Fédération Nationale de la Presse Française, dont MM. R. Salmon (déjà nommé) et Roger Nahon, du Populaire, sont les secrétaires généraux. Le Syndicat de la Presse Parisienne a pour vice-présidents Mme Lazurick et M. Smadja (déjà nommés). MM. Finkelstein et Levinson sont respectivement secrétaire général du Syndicat de la Presse hebdomadaire et président de la commission technique de celui-ci. Le président du Syndicat des Quotidiens régionaux n’est autre que M. P.R. Wolf (déjà nommé) tandis que le Syndicat national de la Presse quotidienne régionale a pour vice-présidente Mme Baylet (déjà nommée).

Avec les journalistes de la première catégorie, ceux-là sont les seuls dont on comprenne parfaitement l’attitude. Nul ne peut s’étonner que les Juifs de France soutiennent leurs frères d’Israël, même si certains de leurs coreligionnaires estiment que c’est, en fin de compte, un mauvais service que l’on rend au judaïsme en général que de soutenir les prétentions excessives des dirigeants sionistes.

Pourquoi la presse est corrompue ?

Les accusations portées contre la presse en général par un gouvernement qui fut bien heureux d’avoir son appui, il y a dix ans, lorsqu’il inaugura sa politique néfaste, ressemblent beaucoup à celles que formulaient jadis des hommes politiques, des écrivains et des journalistes de tendances fort diverses. Autant il est injuste de laisser entendre que tous les journaux, que tous leurs dirigeants, que tous leurs rédacteurs sont des « vendus » — car ce n’est pas vrai, loin de là —autant il serait puéril de vouloir cacher ce qui est. A savoir que la presse ne peut être libre et que, pour vivre ou survivre, elle doit accepter certaines contraintes.

«Les causes profondes de la corruption de la presse, disait Henry Bérenger, qui fut plusieurs fois ministre sous la République, ne sont ni dans son personnel, ni dans son public, ni dans sa liberté. La liberté permet le bien autant que le mal; le personnel et le public ne sont que ce qu’on les fait.

« Ce qui les fait, c’est la ploutocratie et le suffrage universel. Qu’importe que la presse soit libre de par la loi, si elle est domestique dans la société?

«Qui est-ce qui est à la tête des journaux? Des hommes d’argent. Qui est-ce qui alimente la caisse des journaux? Les grosses affaires d’argent. Quel est le but avéré des journaux? Gagner de l’argent.»

Et il concluait : « Dans la presse française, les hommes de pensée sont au service des hommes d’argent. Ils sont payés par eux, suggérés par eux, dirigés par eux. Quels sont ces hommes d’argent et ces hommes de pensée? Sauf de rares et honorables exceptions, ce sont des individus douteux, intelligents mais immoraux, et qui n’ont pu réussir dans d’autres professions, et qui se servent du journal pour s’enrichir et pour jouir.»

On abuse de la naïveté du lecteur

Un rédacteur de l’Illustration, M. Ludovic Naudeau, constatait que «la liberté de la presse n’est autre chose qu’un monopole accordé à certains habiles qui se servent du droit qui leur est concédé pour abuser de la naïveté populaire et usurper la fructueuse prérogative de diriger une partie de l’opinion nationale. A quel titre, je vous le demande, s’arrogeraient-ils la mission d’influencer la conscience de leurs contemporains, de leur présenter sous un aspect tendancieux certaines informations et ainsi de les gouverner sans que ceux-ci s’en doutent? Leurs indignations, leurs colères, leurs frémissantes exhortations, leurs campagnes enflammées, recherchez-en attentivement la cause et presque toujours vous découvrirez, sous le fracas des mots, des intérêts privés.»
Cet article pourrait être écrit aujourd’hui. La Documentation catholique, annexe de La Croix et de la Maison de la Bonne Presse, citait un jour ces lignes de René Johannet sur les influences étrangères qui se faisaient sentir dans les milieux proches de l’Information :
«A l’heure actuelle, rien n’empêche — et quelque précaution que l’on prenne rien n’empêchera jamais — un gouvernement quelconque d’aiguiller du côté de son moulin les forces nationales de ses concurrents désarmés… Sans faire de comparaison, mais en indiquant l’analogie, le nombre d’actionnaires ou de commanditaires grecs dans la presse parisienne dépasse infiniment ce qui serait souhaitable. Les Bulgares ont dû s’en apercevoir au moment du traité de Neuilly.

«Je ne dis rien de la Cavalerie de Saint-Georges. Pendant vingt-cinq années le rouble nous a pourris. Aujourd’hui, le règne du dollar commence…»

Ces lignes datent d’un demi-siècle: ne vous semblent-elles pas prophétiques?

La plaie du journalisme

Dans un livre fameux, «Le patriotisme et la vie sociale», le R. Père Sertillanges a mis ses contemporains en garde contre les graves défauts de la presse moderne: «La plaie du journalisme, écrivait-il, la plaie profonde, tellement profonde que la plupart des médecins de la vie sociale la juge incurable, c’est la vénalité.»

Expliquant à ses lecteurs «comment lire les journaux», le catholique G. Fonsegrive les incitait au lendemain de la Première Guerre mondiale à une «défiance extrême»:

«On n’est jamais sûr, sauf au-dessus de la signature de quelques noms en très petit nombre, de ne pas lire une réclame, une plaidoirie payée au journal, et souvent au journal à la fois et à l’écrivain. Un article tout objectif en apparence, où il n’est question que de chimie ou de géographie, sert à préparer, pour le lendemain ou même pour une autre colonne du journal, le lancement d’une affaire industrielle ou d’une entreprise minière exotique.»

Léon Blum le savait bien

Léon Blum lui-même écrivit un jour qu’il «ne faut pas que la presse soit subventionnée par l’étranger ». Et, précisant sa pensée, il ajoutait :
«Je sais ce qu’un grand journal de Paris a demandé, hier encore, aux socialistes révolutionnaires russes, groupe Ke-rensky, pour insérer deux fois par mois dans ses colonnes des communications qui leur soient favorables.»
«Et tout le monde connaît la mise aux enchères de tant de journaux français entre l’Armistice et la signature du traité de paix.»

«D’ailleurs, ne jouons-nous pas le même jeu à l’étranger en y subventionnant des journaux? Quelque précaution que l’on prenne, il en serait malheureusement de même chez nous, tant que les journaux ne pourront pas couvrir leur budget par des ressources normales. Et tout le problème de la presse est peut-être là. »

Tant que les journaux vivront au-dessus de leurs moyens, c’est-à-dire tant que les lecteurs ne paieront pas le prix pour savoir la vérité, tant que les ressources étrangères à la vente (recettes publicitaires ou subventions occultes) constitueront l’essentiel des « rentrées » des quotidiens et des périodiques, il n’y aura pas de presse libre.

Napoléon disait que «quatre journaux ennemis peuvent faire plus de mal qu’une armée de 100.000 soldats ». Il est probable que M. le baron Edmond de Rothschild, qui dirige le lobby israélien en Europe, doit être aussi de cet avis.

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