« Entre complotisme et populisme, le combat est commun », Macron l’a dit… Et l’enquête de l’IFOP pour la Fondation Jean Jaurès et Conspiracy Watch s’est chargée de le démontrer.
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Il faut dire qu’après la démonétisation de « fascisme », une étiquette trop employée, après la neutralisation de « populisme », un qualificatif de plus en plus assumé, « complotisme » devient l’injure suprême, une des dernières lignes de défense par discrédit à disposition de la bien-pensante.
L’enquête de l’IFOP pratique joyeusement l’amalgame entre vraies théories du complot, infos antisystème et jugements loufoques. Et cela donne un inventaire à la Prévert : la théorie selon laquelle la Terre plate est un « complotisme », au même titre que le créationnisme (dont on ne sait pas très bien si c’est la théorie de la création ou bien une lecture littéraliste des premiers chapitres de la Genèse). Autre théorie complotiste, qui n’a rien à voir : le virus du sida aurait été créé en laboratoire. Loufoquerie : les chemtrails (fumée blanche laissée par les avions) seraient composées de produits toxiques.
Cette gaudriole est mise sur le même plan que l’information documentée selon laquelle AI Qaeda ou Daech ont été manipulés par des services secrets occidentaux. Le « Nouvel ordre mondial » est lui aussi présenté comme une théorie du complot, alors qu’il est promu publiquement par les USA et la plupart des 1 % les plus riches de la planète. Plus près de nous, 55%des sondés adhèrent à la théorie de la collusion entre ministère de la Santé et industrie pharmaceutique pour promouvoir des vaccins, que l’on n’a plus le droit d’estimer nocifs.
Il y a bien d’autres « complotismes » : climat, immigration, 11 septembre, génocide des juifs… Dans la liste, on glisse le grand remplacement, présenté comme un projet politique, complotiste… Pourtant, Renaud Camus se contente de décrire une réalité. Citons deux chiffres pour illustrer ce « fantasme d’extrême-droite » : 2 400 mosquées en 2014 contre 1 500 en 2003 ; la drépanocytose, une maladie génétique touchant les populations d’origine antillaise, africaine et méditerranéenne dépistée à la naissance dans 39 % des cas en France, 73 % en Île-de-France en 2016… Alors, complotisme ? Un peu facile.
Monde&Vie n°950 du 18 janvier 2018.