Conquérants, par Alain Sanders. Avec les baroudeurs d’Algérie
Lu pour vous dans Présent.
Après un bel ouvrage consacré à quelque trente «centurions» qui ont fait l’Indochine française (Présent du 27 février 2016), puis un autre dressant les portraits d’une trentaine de mercenaires aux destins exceptionnels (Présent du 31 janvier 2017), Alain Sanders poursuit son passionnant tour d’horizon de ces grands soldats et aventuriers qui se bousculent dans notre panthéon à nous en publiant, dans la même collection, un volume passionnant, dédié cette fois-ci à « Trente baroudeurs des tout débuts de l’Algérie française ».
Au sein de cette galerie de portraits, nous retrouvons, bien sûr, les figures les plus célèbres de la conquête : le comte de Bourmont, « Bugeaud l’Africain », le général Yusuf, Saint-Arnaud ou encore Cavaignac. Mais aussi bien d’autres, injustement oubliés par l’histoire, tels que Martimprey, Chanzy, Drouet d’Erlon, Clauzel, Changarnier ou encore Canrobert. Des « huiles », mais aussi des sous-officiers et de simples soldats qui ont fait de cette conquête une véritable épopée. Comme le sergent Blandan et sa poignée d’hommes, combattant héroïquement face à plusieurs centaines de cavaliers arabes lors de l’affaire de Boutai, en avril 1842. Ou encore Guillaume Rolland, le fameux clairon de Sidi-Brahim, sonnant la charge face à un Abd el-Kader lui intimant l’ordre de sonner la retraite.
Au-delà de ces portraits aussi fascinants les uns que les autres, le livre d’Alain Sanders met également en évidence, de manière particulièrement intéressante, la rencontre entre deux générations de soldats, réunies dans une même aventure au service de la France et de son Roi : celle des survivants de l’épopée napoléonienne et la suivante, dont l’enfance a été bercée par les exploits des premiers. Ainsi les légendes vivantes que sont Drouet d’Erlon (vétéran d’Austerlitz et de Waterloo !) et d’Hautpoul côtoient-elles le duc d’Orléans, Lamoricière ou encore le duc d’Aumale.
Une œuvre civilisatrice
Autre aspect important qui ressort de cet ouvrage, que devraient lire les contempteurs de la colonisation française et autres adeptes de la repentance : le souci permanent qu’eurent la plupart de ces hommes, qui étaient d’abord des soldats, de mener sur ces terres qu’ils venaient de conquérir une œuvre civilisatrice et même humanitaire. Les exemples abondent et Alain Sanders, judicieusement, ne manque pas de les rappeler.
Enfm, comme dans ses deux précédents ouvrages, l’auteur a eu la bonne idée de revenir en annexe sur plusieurs épisodes célèbres de la conquête (bataille de l’Isly, prise de la smala d’Abd el-Kader, Sidi-Brahim…) et d’y évoquer quelques anecdotes, dont l’origine de la chanson évoquant la fameuse casquette du père Bugeaud.
Dernier point : on notera le soin tout particulier apporté par l’éditeur à la couverture de ce nouveau volume qui, sur fond de carte de l’Algérie française, a fait figurer le superbe portrait d’un chasseur d’Afrique peint par Chard. Chasseur dont les traits, cela n’aura échappé à personne, ne sont autres que ceux de l’auteur…
Franck Delétraz
Présent n°9029 du 16 janvier 2018