Lu pour vous ce matin dans Présent :
Le quotidien communiste joue sa survie en 2016. Avec plus d’un million d’euros de pertes l’année dernière (pour 25 millions d’euros de chiffre d’affaires) et près de deux millions d’euros en 2014, L’Humanité est à nouveau au bord du précipice. Son endettement avoisinerait la dizaine de millions d’euros. Du coup, pour passer les échéances de trésorerie — notamment le paiement d’une partie du 13e mois en juin — ses dirigeants sont, une fois encore, contraints d’administrer des remèdes de cheval au malade.
En premier lieu, la pagination de L’Humanité sera réduite au lendemain de la fête du travail, le 2 mai. Un symbole négatif qui fera probablement se retourner dans sa tombe Jean Jaurès, le fondateur en 1904. Le budget piges et l’embauche de CDD sont par ailleurs gelés jusqu’à nouvel ordre. Les déplacements des journalistes seront limités, tout comme les coûts de distribution vers les points de vente, a annoncé le directeur Patrick Le Hyaric lors d’une assemblée générale du personnel tenue le 7 avril. Aucune taille dans les effectifs (environ 200 salariés) n’est pour l’instant annoncée. La direction pourrait néanmoins y être contrainte si l’horizon reste aussi plombé.
Le député européen communiste utilise par ailleurs les vieilles recettes pour faire entrer des liquidités dans les caisses. Une nouvelle souscription a été, lancée en janvier auprès des lecteurs. Cette dernière aurait déjà rapporté 600.000 euros en deux mois. L’Humanité table, comme en 2015, sur des recettes totales de deux millions d’euros par ce biais. Le titre va aussi demander une avance sur les aides perçues au titre des journaux à faibles recettes publicitaires. Un ballon d’oxygène bienvenu en ces temps de vaches maigres.
Vu les tirs de barrage permanents du quotidien contre la loi sur le travail El Khomri et son soutien constant aux manifestants de tous poils qui battent le pavé depuis plusieurs semaines, il n’est pas sûr que L’Humanité obtienne gain de cause auprès de ses (ex) amis socialistes. Reste à comprendre comment on en est arrivé là. Le journal a vendu moins de 38000 exemplaires par jour en 2015. Il a perdu près de 10 000 exemplaires en quatre ans. La baisse structurelle des acheteurs, de mise dans tous les quotidiens nationaux et régionaux, explique en partie ces mauvais chiffres. Pour autant, les choix stratégiques de la direction du journal sont également en ligne de mire.
Depuis 2013, L’Humanité a donné congé à son personnel chargé de récolter des abonnés. L’abonnement militant, qui progressait d’environ 5 % par an, régresse désormais. De son côté, la Fête de L’Humanité est tout juste rentable, faute d’investissements importants. Les syndicats du journal, C.G.T en tête, devraient rapidement demander la nomination d’un expert indépendant, afin d’auditer les conséquences financières de cette politique.
Charles Mansel, Présent